Il est assez rare de voir une exposition commencer par un arbre généalogique. C’est le cas de celle que le Musée d’art moderne André-Malraux (MuMa), au Havre (Seine-Maritime), consacre à la famille Senn. Une dynastie de négociants protestants d’origine suisse, enrichis par le commerce du coton via le port normand. Elle fut fondée au XIXe siècle par Edouard Senn (1828-1915) et son épouse, Alice Schweisguth (1839-1918), d’une part, et par Ernest Siegfried (1843-1927) et Emilie Schlumberger (1848-1928), d’autre part. Le mariage de leurs enfants, Olivier Senn (1864-1959) et Hélène Siegfried (1871-1941), est le point de départ d’une saga, celle de grands collectionneurs et mécènes, qui a culminé, en 2004, avec la donation – suivie d’autres –, par une de leurs descendantes, Hélène Senn-Foulds, de 205 œuvres, principalement impressionnistes, acquises par son grand-père Olivier Senn. Elle avait initialement pensé au Musée d’Orsay, mais Antoine Rufenacht (1939-2020), alors maire du Havre et également descendant d’Olivier Senn, la convainquit que ce trésor serait plus à sa place au MuMa.
Vingt ans plus tard, le musée revient sur cette famille atypique, dans son versant américain : certains membres de celle-ci s’étant implantés dans les années 1940 aux Etats-Unis. C’est le cas d’Alice, née Senn, épouse de Rodolphe Rufenacht. C’est du côté de leurs héritiers que Géraldine Lefebvre, la directrice du MuMa, est allée chercher, avec le cocommissaire Michaël Debris, une bonne part des œuvres de l’actuelle exposition – ces derniers collectionnent aussi, selon la tradition familiale, ce qui permet de montrer un grand et beau Nicolas de Staël (1914-1955) et de conclure le parcours de l’exposition avec un non moins impressionnant tableau de Geneviève Asse (1923-2021).
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