Le maire de la commune des Alpes-Maritimes a décidé de prendre un arrêté pour interdire toute catastrophe naturelle.
Une réponse originale à un problème pourtant bien plus sérieux.
Cinq ans après la dévastatrice tempête Alex, la commune ne parvient plus à s’assurer.
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Tempête Alex : la désolation dans les Alpes-Maritimes
La nouvelle prête à sourire, mais la situation aurait pu être dramatique pour la commune de Breil-sur-Roya. En juin dernier, la commune des Alpes-Maritimes, durement touchée par la tempête Alex en 2020, était lâchée par son assureur pour l’année 2025. Un coup dur pour la localité qui a alors engagé une procédure judiciaire contre son partenaire historique.
Le 31 décembre, le maire de la commune, Sébastien Olharan, se réjouissait d’une première victoire : à quelques jours du jugement, l’assureur a finalement accepté de renouveler pour un an ses garanties, notamment pour la responsabilité civile et la protection juridique, permettant à la localité d’ouvrir ses structures d’accueil pour la rentrée scolaire de 2025 comme ses crèches, ses écoles ou ses centres de loisir.
Mais la victoire n’est que partielle : les bâtiments de la commune ne sont, eux, toujours pas assurés et font l’objet d’un référé devant le tribunal administratif. S’il n’est pas obligatoire pour une mairie de les assurer pour les dommages aux biens, cela représente pour la municipalité un risque financier énorme en cas, par exemple, de nouvelle catastrophe naturelle dévastatrice. Pour limiter les risques, l’édile de Breil-sur-Maire a donc décidé de réagir avec humour à la situation : il a tout simplement pris un arrêté d’interdiction des catastrophes naturelles sur sa commune.
Un itinéraire bis pour les eaux de pluie
L’arrêté municipal, qui porte sur « l’interdiction des sinistres sur les bâtiments communaux désormais non assurés », a été publié le 1ᵉʳ janvier. Considérant « le risque financier considérable que fait courir à la Commune de Breil-sur-Roya l’absence d’assurance sur les bâtiments communaux », qu’il « s’agit de bâtiments publics financés par l’argent des contribuables » et que la commune, propriétaire de 70 biens immobiliers, ne bénéficie pas d’une situation budgétaire lui permettant de « faire face aux conséquences financières d’un nouveau sinistre en l’absence assurance », le texte prévoit que « les catastrophes naturelles sont interdites sur tout le territoire de la commune de Breil-sur-Roya ».
L’arrêté concerne les incendies, les inondations, les mouvements de terrains, les séismes, les éboulements, les tempêtes, la neige, la grêle, les vents violents, les avalanches, les dégâts des eaux, dégâts électriques, « susceptibles d’endommager les bâtiments communaux ». Pour le ruissellement des eaux de pluie, « à l’origine des crues torrentielles, un itinéraire de déviation est proposé à l’extérieur du territoire de la commune », pointe encore le texte avec humour.
Par ailleurs, puisque les bâtiments ne sont plus assurés, le maire interdit « les activités humaines susceptibles de porter atteinte aux biens communaux tels que les émeutes, le terrorisme, le vandalisme, le vol et les dégradations involontaires ». Le maire confie enfin à « Monsieur le Commandant de Gendarmerie, la Police municipale, Météo-France, les assureurs » et « toutes les personnes ayant une influence sur la météo ou suffisamment de pouvoir pour protéger les bâtiments communaux contre toute forme de sinistre » la tâche de mettre en application l’arrêté.
Si le maire de Breil-sur-Roya convient du côté « absurde » de l’arrêté, il met en lumière les difficultés que rencontrent certaines communes, départements ou région avec leurs assurances, alors que les catastrophes climatiques se sont multipliées ces dernières années, engendrant de nombreux dégâts. En effet, selon lui, le refus de son assureur historique de renouveler son contrat et le refus des autres professionnels contactés est en lien direct avec la tempête Alex. « Cette décision est une conséquence directe et évidente de la Tempête Alex dont une partie de l’indemnité avait été versée quelques semaines auparavant », écrit le maire dans un communiqué.
La tempête Alex a représenté un coût de 10 millions d’euros de dégâts sur les biens assurés. « Soit cinq ans de rémunération des 50 agents municipaux, si la commune devait sortir l’argent de sa poche », avait déjà alerté Sébastien Olharan auprès de l’AFP en novembre dernier. Sans assurance, la facture pourrait ainsi être insupportable pour la petite commune de 2200 habitants en cas de nouvelle tempête Alex.