Abrège Frère et Abrège Sœur sont dans un bateau. Qui tombe à l’eau ? En tout cas, les deux boivent la tasse. Le premier est un jeune commercial qui reprend, depuis janvier 2024, un concept anglo-saxon plutôt rigolo : résumer en une phrase, tout en avalant une grosse goulée de café, les interminables « stories » des influenceurs et tiktokeurs ; des femmes, en majorité, sur ce type de formats. Un succès immédiat et une source d’inspiration pour de nombreux jeunes hommes, qui vont ainsi militer en ligne pour que le frérot « abrège » une multitude de créatrices de contenus dont les vidéos dépassent une minute. Bref, faire taire toutes ces « gonzesses ». Un jeu de massacre virtuel auquel Abrège Frère ne s’est pas prêté, sans pour autant le condamner.
La seconde, secrétaire de 27 ans, a repris le concept sous le nom d’Abrège Sœur, le 10 mars. Problème : elle coupe la chique aux gourous masculinistes (mais pas que), en résumant leurs vidéos en deux ou trois mots : « Je suis misogyne » ; « Il n’a aucune confiance en lui ». Ou en complétant leurs fins de phrase : « Grâce aux féministes, les filles couchent avec n’importe qui… », commence un tiktokeur. « Mais pas avec toi », conclut-elle dans un grand sourire, tasse à la main. Il aura suffi de quelques jours pour que prospèrent, dans ses commentaires et messages privés, des centaines de messages de haine, retranscrits ici tels quels : « t’es pas prête à ce qui va t’arrivé, Mazan devrais te mettre en garde » ou « t’a déclaré la guerre – Hitler et les douches en Pologne à côté, ses relaxant ». En une semaine, son compte sera banni cinq fois, pour « usurpation d’identité ». Des signalements en masse peuvent générer automatiquement une fermeture de compte. Contacté par Le Monde, TikTok France a répondu n’avoir « aucun élément à partager sur ce sujet ».
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