Les obsessions sont rarement bonnes conseillères. Celle de Donald Trump sur les éoliennes remonte à 2011, lorsque l’homme d’affaires d’alors n’avait pu empêcher la construction d’un parc éolien offshore visible depuis l’un de ses terrains de golf en Ecosse. Qualifiées d’« affreuses », « coûteuses » et « inefficaces », ces éoliennes viennent encore de subir les foudres du président des Etats-Unis. Les permis d’exploitation de tous les grands projets offshore en cours de construction aux Etats-Unis ont été suspendus avec effet immédiat le 22 décembre.
L’annonce concerne notamment cinq projets situés sur la Côte est qui représentent un investissement total de 25 milliards de dollars (environ 21 milliards d’euros). Ces champs, qui avaient obtenu des crédits fédéraux sous le mandat de Joe Biden, devaient alimenter en électricité plus de 2,5 millions de foyers et d’entreprises et créer près de 10 000 emplois.
Cette suspension des permis d’exploitation a été justifiée par des raisons de sécurité nationale. Les pales et les mats géants des éoliennes seraient susceptibles de provoquer des interférences radars. Un prétexte étrange, dans la mesure où les projets avaient été conçus en concertation avec l’armée.
L’offensive de Donald Trump contre les éoliennes est généralisée, et prend des allures de guerre de religion. Dès le premier jour de son second mandat présidentiel, il a signé un décret suspendant toute location de terres et d’eaux fédérales pour la construction de nouveaux parcs. Son administration s’en est ensuite prise méthodiquement aux parcs éoliens ayant obtenu des permis de l’administration Biden, parfois au prix de revers juridiques.
Début décembre, un juge fédéral a invalidé la suspension des crédits imposée par le décret de janvier, la qualifiant d’« arbitraire et capricieuse ». Au total, l’administration Trump prévoit de supprimer le financement de 223 projets énergétiques, et a menacé ou bloqué la construction d’environ 8 gigawatts de capacité de production d’électricité, soit l’équivalent de huit réacteurs nucléaires.
Si cette décision est cohérente avec sa volonté de concentrer la politique énergétique américaine sur les énergies fossiles, et conforme à son déni du changement climatique, elle n’en risque pas moins de fragiliser la production d’électricité à un moment critique pour le pays. La demande d’électrons aux Etats-Unis devrait augmenter de 35 % d’ici à 2040 en raison du développement accéléré des centres de données consacrés à l’intelligence artificielle.
Sur un an, le coût de l’électricité a augmenté en moyenne de plus de 5 %. Cette hausse devrait se poursuivre, dans la mesure où le réseau électrique a un besoin urgent de moderniser des infrastructures obsolètes, d’autant plus vulnérables que les phénomènes météorologiques extrêmes se multiplient en raison du changement climatique.
Dans ce contexte, se priver d’une production d’énergie décarbonée, dont le prix avait été encadré par des contrats de long terme, apparaît comme une décision aberrante. Le prix de l’électricité est en train de devenir un enjeu à quelques mois des élections de mi-mandat qui devraient être dominées par la question du pouvoir d’achat, alors que l’inflation tarde à refluer.
A plus long terme, les Etats-Unis prennent le risque d’être totalement déclassés dans la bataille stratégique de la décarbonation, qui, quelles que soient les obsessions de Donald Trump, structurera l’offre énergétique d’ici au mitan du siècle. Vouloir faire sans les énergies renouvelables constitue un très mauvais calcul.












