Déménager
« Et si on faisait une colove, une colocation d’amoureux ? » Voilà ce que je propose à Sylvain en octobre 2024. J’ai 27 ans, on est ensemble depuis quatre ans, on s’aime, je veux quitter mon studio de 30 mètres carrés, lui quitter sa mère. Et on ferait des économies de loyer. Mais impossible pour moi d’utiliser l’expression « vivre ensemble », car je suis illico envahie par un tsunami de peurs : peur qu’on se marche dessus, qu’une routine négative s’installe, que je doive jouer le rôle de sa mère. Sylvain aussi est anxieux de quitter le giron maternel, mais il l’exprime à sa façon : il me parle d’une colocation à trois, lui, moi et son chat. Alors on avance… à reculons. On vivra ensemble, mais on dormira séparément.
Il faut dire que le sommeil est une question essentielle de notre couple. Je me couche très tard, j’ai du mal à m’endormir. Je vis seule depuis cinq ans, j’ai pris l’habitude de dessiner jusqu’à 3 heures du mat, de jouer de la guitare quand je n’arrive pas à dormir. Sylvain, lui, se couche plus tôt, a parfois besoin de faire des siestes dans la journée.
Dès janvier, on se met à visiter des trois-pièces, mais les biens sont rares et chers, et des familles nous passent devant. Sylvain se met à douter : « Qu’est-ce qu’on va dire aux autres, c’est bizarre de ne pas dormir ensemble, non ? » Alors on discute, beaucoup, beaucoup, de ce que sera la vie à deux. J’ai besoin d’anticiper. On se met d’accord sur la notion de « temps calme » après dîner, sur le brunch le dimanche, les soirées séparées du mardi, les soirées film du mercredi, les soirées potes le samedi… Ça paraît ultra-flippant, de baliser à ce point-là le quotidien, mais ça nous permet d’avancer. Peu à peu, je me dis qu’avoir un coin avec un lit d’appoint suffirait à me rassurer.
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