La France a vu surgir, en 2025, une parole inédite, celle de l’antimafia. En Corse et à Marseille, la société civile, des élus, des responsables publics, relayés par les médias, ont investi la rue pour clamer que la lutte contre les mafieux n’était pas seulement l’affaire de la justice. Une prise de conscience loin d’être anecdotique alors qu’un parquet national anticriminalité organisée doit voir le jour en janvier. Elle répond à la menace grandissante que font peser le narcotrafic marseillais et la pègre insulaire sur la démocratie. Elle montre aussi les limites d’un Etat qui a laissé prospérer sur son sol un pouvoir concurrent. Pour la première fois, le corps social a dit non à ces truands devenus mafieux dont l’activité n’est plus simplement criminelle, mais consiste à infiltrer la société légale et à en prendre le contrôle.
Fin février, la mère de Pierre-Louis Giorgi, un sapeur-pompier de 33 ans tué, le 23 décembre 2024, dans un bar d’Ajaccio (Corse-du-Sud), prend la parole sur Facebook : « Chez nous, les voyous et les assassins vont et viennent sans être inquiétés, vénérés et adulés par des crétins qui restent silencieux (…) ; pour toutes les victimes mortes ou blessées pour lesquelles vous avez pleuré, n’ayez pas peur, assumez vos responsabilités. Je donne mon avis en tant que mère, que corse et en tant que citoyenne. Je prends le risque “liberté d’expression”. »
Dénoncer cet ennemi de l’intérieur
Ces mots étaient dans les esprits, le 8 mars, à Ajaccio, lors de la première manifestation antimafia organisée en Corse. Lancée par les deux collectifs antimafia Massimu-Susini et Maffia no, a vita iè (« non à la mafia, oui à la vie »), créés en 2019, elle réunissait 1 500 personnes derrière deux banderoles frappées des slogans « Assassini, maffiosi, fora » (« assassins et mafieux, dehors ») et « A maffia tomba, U silenziu dino » (« la mafia tue, le silence aussi »). Elle interrogeait non seulement la ville, mais toute l’île sur ce qu’elle était devenue.
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