Un climat pesant règne dans la station sud-africaine Sanae IV basée en Antarctique, où des chercheurs vivent coupés du monde.
Un membre de l’équipe d’hivernage a dénoncé le comportement de l’un de ses collègues, accusé de menaces de mort, d’agression physique et sexuelle.
Toute intervention extérieure demeure impossible en raison des conditions météorologiques glaciales.
C’est un huis clos angoissant qui se joue loin de toute civilisation. Reclus pour dix mois dans la station antarctique Sanae IV, située à plus de 4.000 km de chez eux, dans un environnement glacial où les températures frôlent les -23°C avec des vents à plus de 200 km/h, dix scientifiques sud-africains vivent un cauchemar.
Dans un courriel envoyé depuis la base et partagé avec le quotidien sud-africain Sunday Times (nouvelle fenêtre), un membre de l’équipe de recherches a accusé un collègue de menaces de mort, d’agression physique et même sexuelle. Le lanceur d’alerte a dénoncé le comportement « profondément troublant » de l’individu, qui engendre « un climat de peur et d’intimidation ».
Selon le courriel du dénonciateur, « de nombreuses inquiétudes » avaient déjà été soulevées au sujet de l’agresseur présumé, entre le débarquement du groupe de scientifiques en Antarctique par le navire sud-africain SA Agulhas II fin décembre et le départ du bateau un peu plus d’un mois plus tard. « Malheureusement, son comportement a atteint un niveau profondément inquiétant », a-t-il écrit, relatant les faits qui seraient survenus dans la base.
Je me demande si je ne serais pas la prochaine victime
Je me demande si je ne serais pas la prochaine victime
Le scientifique lanceur d’alerte
« Son comportement est devenu de plus en plus flagrant et j’éprouve de grandes difficultés à me sentir en sécurité en sa présence », a-t-il affirmé dans son message désespéré au gouvernement sud-africain. « Je reste profondément préoccupé par ma propre sécurité, me demandant constamment si je ne serais pas la prochaine victime. (…) Il est impératif que des mesures immédiates soient prises pour assurer ma sécurité et celle de tous les employés ».
Interrogé par le Sunday Times, Dion George, le ministre sud-africain de l’Environnement, dont le département gère le programme Antarctique du pays, a confirmé qu’une agression avait bien eu lieu. « Il s’agissait d’un différend concernant une tâche que le chef d’équipe voulait confier à l’équipe – une tâche soumise aux conditions météorologiques et nécessitant un changement d’horaire », a-t-il expliqué. « L’agresseur du chef d’équipe éprouve des remords et a été réévalué psychologiquement de son plein gré. »
Déjà un précédent en 2017
« Une intervention est en cours », a poursuivi le représentant sud-africain, qui a dit « étudier des options » pour régler la situation, sans préciser lesquelles. L’isolement extrême de la station Sanae IV complique, pour l’instant, toute intervention extérieure. « Imaginez être confiné dans un tel endroit. Les gens peuvent développer un syndrome de la cabane, ce qui peut être très désorientant », a analysé un spécialiste. Il faudrait une quinzaine de jours pour rejoindre et évacuer l’équipe d’hivernage.
« L’unité de bien-être est en contact permanent avec l’équipe de la base pour trouver des solutions et des moyens durables d’améliorer le bien-être des membres de l’équipe situés dans cette base éloignée », a fait savoir un porte-parole du ministère sud-africain. « Une enquête complète est en cours et le ministère agira en conséquence en cas de mauvaise conduite de tout fonctionnaire. »
Ce n’est pas la première fois que des chercheurs sud-africains basés en Antarctique font l’actualité. En 2017, un membre d’une équipe de recherches de l’île Marion aurait attaqué l’ordinateur portable d’un collègue à coups de hache. La raison de sa colère froide ? La femme avec qui il était en couple venait de refuser sa demande en mariage.