La présidente mexicaine, Claudia Sheinbaum, veut croire qu’il est encore possible de raisonner Donald Trump, en lui présentant « des données simples » sur les conséquences pour les Etats-Unis, d’imposer un droit de douane aux importations mexicaines – et également canadiennes – au premier jour de son mandat. Mardi 26 septembre, elle a donc écrit à Donald Trump, en usant d’exemples frappants : « Savez-vous que les principaux exportateurs du Mexique vers les Etats-Unis sont General Motors, Stellantis et Ford Motors Company, qui sont arrivés au Mexique il y a quatre-vingts ans ? », écrit-elle dans une missive qu’elle a lu lors de sa conférence de presse quotidienne.
Sur X, l’économiste mexicain et professeur au TEC de Monterrey (ITESM) Mario Campa a rappelé « qu’imposer des taxes douanières au Mexique va durement toucher l’industrie de Detroit [Michigan], déjà en grande difficulté face à la menace chinoise ». Mais le secteur automobile du Mexique lui-même est exposé. Il représente 20 millions d’emplois directs et indirects et a connu une croissance annuelle de près de 9 % ces cinq dernières années, en grande partie grâce à l’investissement américain.
Les deux économies sont littéralement imbriquées depuis la signature de l’accord de libre-échange nord-américain (Alena) en 1994, devenu l’Accord Canada-Etats-Unis-Mexique, en 2020. Cette interdépendance n’a fait que croître en trente ans en particulier le long de cette frontière de 3 000 kilomètres où une grosse partie du PIB de l’Amérique du Nord est produite.
Des files de camions
Dans les villes installées à la frontière, le paysage alterne les zones industrielles et les files de camions qui patientent aux points de passage. Ces clusters – l’automobile à Ciudad Juarez (Chihuahua), l’électronique pour Tijuana (Basse-Californie) – ont été mis en place au sein du système des maquiladoras. Ces usines d’assemblage, implantées au Mexique depuis 1965 et qui bénéficient d’exemptions fiscales et douanières, travaillent pour 1 200 multinationales et produisent 60 % des exportations du Mexique vers les Etats-Unis, selon les données de l’Association nationale des maquiladoras (INDEX). La moitié de ces exportations concerne les secteurs de l’automobile, des poids lourds et des semi-conducteurs.
En parallèle, le Mexique a bénéficié du phénomène du nearshoring, cette stratégie d’externalisation dans les pays proches géographiquement. Grâce à une main-d’œuvre désormais qualifiée et à un coût inférieur à celui de la Chine, le Mexique a édifié un écosystème industriel pour l’aéronautique, l’électronique et les nouvelles technologies. La décision, en janvier 2023, du président sortant Joe Biden, d’inclure le Mexique et le Canada dans le Chips and Science Act, un paquet d’aides économiques pour soutenir la production locale de semi-conducteurs, a encore renforcé cette délocalisation.
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