Dans son livre Toutoute (Fayard, 256 pages, 22,90 euros), enquête itinérante, drôle et hyperdocumentée sur la place prise par les animaux de compagnie dans nos vies, la journaliste Mylène Bertaux pose une question judicieuse : « Le chien est-il le nouveau baby-foot ? » On se souvient qu’à l’époque où les start-up ont émergé, la présence d’un baby au bureau était censée symboliser un rapport au travail différent, plus transversal, plus ludique. Après quelques parties enfiévrées, nombre de jeunes salariés se sont aperçus que c’était aussi un bon moyen de leur imposer des horaires à rallonge en leur faisant croire qu’ils étaient au PMU du coin. Bref, le baby-foot est devenu suspect. Et a été remplacé par un nouveau « vecteur d’engagement », à poils cette fois : le toutou de bureau, que sa moue attendrissante place au-dessus de tout soupçon.
« En France comme à l’étranger, les initiatives se multiplient pour accueillir ces nouveaux membres de la famille que l’on ne veut plus laisser seuls toute la journée », écrit Mylène Bertaux. Cette tendance dite « pet at work », porté chez nous (non sans arrière-pensées) par des boîtes comme Royal Canin ou Purina, traduit le changement de statut de l’animal dans nos sociétés, de plus en plus considéré comme un partenaire à part entière, auquel l’on devrait les mêmes égards qu’à un humain. De la même manière que l’on peut se considérer comme « pet-parent » d’un corgi, il est possible, en jetant un œil au teckel qui ronfle à vos pieds pendant que vous rédigez un message Slack, de voir là non pas une improductive saucisse alanguie, mais un authentique « pet-collègue ».
En effet, s’il a souvent l’air de ne rien faire, le « pet-collègue » (qui peut aussi être un chat, un hamster…) convivialise la vie de bureau : selon une étude de 2017 réalisée par le site Wamiz, 8 employés sur 10 affirment que les animaux ont un impact positif sur leur travail. En leur présence, 60 % des sondés se sentent moins stressés, 39 % trouvent que la communication dans l’équipe s’améliore, 17 % se pensent plus efficaces et productifs et 6 % voient leur concentration accrue. Il y aurait donc un véritable « effet ouaf » sur la qualité de vie au bureau. Si le monde était totalement antispéciste, le « pet-collègue », par le bonheur qu’il génère, pourrait même candidater au poste de chief happiness officer.
Une pratique à encadrer
Dans ce contexte velu, la possibilité d’emmener son chien ou son chat au bureau figure un nouveau levier pour attirer les jeunes talents et certaines boîtes proposent même des congés pour l’adoption d’un nouvel animal, comme lors de l’arrivée d’un enfant. Cette politique « pet-friendly » peut être utilisée pour renforcer subrepticement l’attachement à l’entreprise. Pionnier en la matière, Google a même trouvé un petit nom pour les chiens qui fréquentent ses bureaux : les « dooglers » (mix de dog et Google).
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