Le groupe est soupçonné d’avoir versé cinq millions d’euros à des groupes djihadistes pour maintenir son activité en Syrie, alors que le pays s’enfonçait dans la guerre.
Les huit prévenus seront jugés pour financement d’entreprises terroristes, et pour certains pour non-respect de sanctions financières internationales.
Le procès doit se tenir en fin d’année 2025.
Ils devront s’expliquer devant la justice. Trois juges d’instruction ont ordonné ce mercredi 16 octobre un procès pour financement du terrorisme contre le groupe Lafarge et huit personnes, dont d’anciens responsables, pour avoir poursuivi les activités du cimentier en Syrie jusqu’en 2014, ont indiqué des sources proches du dossier à l’AFP. Ce procès doit avoir lieu du 4 novembre au 9 décembre 2025, selon un calendrier prévisionnel.
L’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel précise que l’ensemble des personnes mises en cause ont « dans une logique de recherche de profits pour l’entité économique qu’ils servaient, ou pour certains de profit personnel direct, organisé, validé, facilité ou mis en œuvre une politique supposant de faire parvenir un financement aux organisations terroristes implantées autour de la cimenterie » à Jalabiya (Syrie).
Les huit prévenus sont des membres de la chaîne opérationnelle ou de la chaîne de sûreté, des intermédiaires syriens, ainsi que le directeur général de Lafarge SA d’alors, Bruno Lafont. Ils seront jugés pour financement d’entreprises terroristes et, pour certains, non-respect de sanctions financières internationales. Un non-lieu a par ailleurs été ordonné pour l’ancien directeur de la sûreté Jean-Claude Veillard, mis en examen dans cette affaire depuis fin 2017. Un « grand soulagement » pour ses avocats, qui parlent de « sept années d’un combat judiciaire sans relâche ».
Un versement de cinq millions d’euros
C’est le parquet national antiterroriste (Pnat) qui avait requis en février dernier un procès devant le tribunal correctionnel. Le groupe est soupçonné d’avoir versé, via sa filiale syrienne, cinq millions d’euros à des groupes djihadistes, dont l’organisation État islamique (EI), ainsi qu’à des intermédiaires, pour maintenir son activité, alors même que la Syrie s’enfonçait dans la guerre.
« La société conservait son autonomie décisionnelle, et aurait pu à tout moment mettre fin à l’exploitation de l’usine, notamment au moment où ses dirigeants avaient pris connaissance des exigences financières des entités terroristes », écrivent les juges d’instruction. « En acceptant de payer ces entités, la société évaluait les contreparties qu’elle pourrait en retirer, telles que le déblocage des routes, la libre circulation des camions et des salariés de l’usine grâce à la délivrance de laissez-passer », ajoutent-ils.
Le volet de l’information judiciaire, ouverte en juin 2017, concernant les soupçons de complicité de crimes contre l’humanité de la société, est toujours en cours.