La garde nationale de Tunisie a annoncé avoir secouru, dans la nuit de dimanche 16 à lundi 17 mars, 612 migrants subsahariens qui tentaient de rallier l’Europe et repêché 18 corps d’autres candidats à l’immigration provenant de pays d’Afrique subsaharienne.
Les rescapés ont été secourus dans plusieurs opérations, dans la région de Sfax (centre-est) après que leurs embarcations ont chaviré ou sont tombées en panne. Des unités de la garde maritime du centre du pays « ont réussi à faire échouer plusieurs tentatives séparées de rallier clandestinement l’espace européen », a fait savoir lundi la direction de la garde nationale dans un communiqué.
Des images vidéo diffusées par des gardes-côtes rattachés à la garde nationale montrent des personnes épuisées, parfois munies de grosses bouées noires, notamment des femmes et des enfants dont certains paraissent morts. Sur ces images, on voit au moins un corps flottant dans la mer, des hommes, des femmes et des enfants en grande détresse sur un bateau plus grand, et d’autres essayant de nager vers le navire des gardes-côtes. Elles montrent également une femme qui hisse avec difficulté un enfant le corps tout rigide, visiblement sans vie, à bord du bateau des sauveteurs. D’autres migrants secourus, complètement exténués, boivent de l’eau versée avec précaution par les sauveteurs.
Avec la Libye, la Tunisie, dont le littoral se trouve à certains endroits à moins de 150 km de l’île italienne de Lampedusa, est devenue ces dernières années le principal point de départ en Afrique du Nord des migrants cherchant à gagner l’Europe.
« Situation précaire et dangereuse »
Des milliers de migrants subsahariens – 20 000 à 25 000 selon des sources humanitaires – s’entassent depuis des mois dans des campements de fortune sans eau potable ni hygiène ni soins médicaux, au milieu d’oliveraies près de villages comme El Amra, à une trentaine de kilomètres au nord de Sfax, à proximité de plages d’où régulièrement ont lieu les départs clandestins. Un grand nombre ont été chassés de Sfax, deuxième ville tunisienne depuis l’automne 2023, d’autres sont arrivés ces derniers mois.
Des internautes tunisiens ont publié récemment des appels, pour certains à relents racistes, pour que les autorités les évacuent, se plaignant de voir leurs champs occupés par des centaines de tentes, avec une accumulation d’ordures sur leurs propriétés.
L’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) a dénoncé dans un rapport paru en janvier le fait que les migrants subsahariens se retrouvent « souvent privés de solutions d’hébergement et laissés dans une situation précaire et dangereuse ».
Ils sont nombreux à Tunis et dans sa périphérie à s’adonner à des petits boulots informels dans la construction ou la restauration, ou à mendier pour essayer de recueillir des fonds pour payer des passeurs et quitter la Tunisie.
Hausse des interceptions de bateaux clandestins
Selon un communiqué de l’Unicef publié début janvier, le nombre de migrants morts ou disparus en Méditerranée « a dépassé les 2 200 personnes en 2024, dont près de 1 700 vies perdues » sur la dangereuse route de Méditerranée centrale, entre l’Afrique du nord et les côtes italiennes. « La majorité de ces migrants fuient des conflits violents et la pauvreté », a rappelé l’Unicef.
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A la suite d’une campagne déclenchée par un discours aux accents xénophobes du président tunisien Kaïs Saïed au printemps 2023, des milliers de migrants d’Afrique subsaharienne avaient été rapatriés par leurs pays, tandis que les tentatives d’émigration clandestine vers l’Europe s’étaient accélérées.
Sous l’impulsion de l’Italie, l’Union européenne a conclu en juillet 2023 un « partenariat » avec la Tunisie prévoyant une aide budgétaire de 150 millions d’euros et l’octroi de 105 millions d’euros pour aider le pays à lutter contre l’immigration irrégulière.
Ces aides ont débouché sur une hausse des interceptions de bateaux clandestins en 2024 et une nette réduction des arrivées en Italie (-80 % sur un an l’année dernière par rapport à 2023 avec 19 246 arrivées depuis la Tunisie).