samedi, mai 18
Vladimir Potanine, à Moscou, en Russie, le 12 décembre 2017.

Acculé par les sanctions, Vladimir Potanine, patron et copropriétaire du géant minier russe Norilsk Nickel (ou Nornickel), s’apprête à délocaliser une partie de sa production en Chine, un choix qui confirme le basculement de la Russie vers son principal partenaire commercial. Inédit, ce transfert industriel jouit d’un « soutien politique » au plus haut niveau, révèle M. Potanine, réputé proche du Kremlin, dans une interview publiée par l’agence russe Interfax, lundi 22 avril.

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Norilsk Nickel prévoit d’exporter du cuivre, du nickel, du cobalt et du lithium vers la Chine, leader du raffinage et de la transformation de ces métaux indispensables à la transition énergétique. Dans un premier temps, l’entreprise va acheminer 2 millions de tonnes de concentré de cuivre par an vers les sites chinois de transformation, via la voie maritime du nord, la route polaire chère à Vladimir Poutine, que l’oligarque promet de renforcer en matière de capacités logistiques.

Les sanctions infligées à la Russie depuis l’invasion russe de l’Ukraine, le 24 février 2022, sont à l’origine de sa décision. Ayant restreint l’accès au crédit et entraîné des frais supplémentaires en paiements d’intermédiaires, d’assurances, de commissions, elles ont fait perdre à Norilsk Nickel en 2023 20 % de ses revenus de l’année précédente. Par ailleurs, les paiements entre entreprises sont devenus un vrai casse-tête. « Y compris dans les juridictions amies, ils constituent désormais l’un des principaux goulots d’étranglement, empêchant les exportateurs et les importateurs d’exercer normalement leurs activités », déplore l’industriel.

« Un rare aveu »

« Les propos de Vladimir Potanine constituent un rare aveu, de la part d’un homme d’affaires russe de premier plan, à propos de l’impact négatif des sanctions sur le tissu industriel russe », souligne Agathe Demarais, spécialiste de géoéconomie au Conseil européen pour les relations internationales.

Un cap a été franchi le 12 avril, lorsque les Etats-Unis et le Royaume-Uni ont interdit l’importation des métaux non ferreux en provenance de Russie. Le pivot vers l’Orient est alors devenu inéluctable. La Chine, qui consomme environ 50 % de la production mondiale de nickel et de cuivre, apparaît comme l’issue inévitable du géant minier, la solution à tous ses problèmes. « Nous transférerons nos problèmes environnementaux, nos problèmes de paiement, nos problèmes d’accès au marché, nos problèmes d’adaptation de nos produits au marché de consommation où ils seront résolus le plus efficacement, c’est-à-dire en Chine. »

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