- Sur les réseaux sociaux, de nombreuses astuces pour trouver le sommeil circulent.
- Lumière rouge, faire du sport, supplément de mélatonine… Les conseils inutiles, voire dangereux, sont légion.
- L’équipe des Vérificateurs décortique ces publications, en partenariat avec l’Inserm.
Suivez la couverture complète
L’info passée au crible des Vérificateurs
Qui n’a pas rêvé de tomber dans les bras de Morphée sans s’en soucier ? Trouver le sommeil n’est pas toujours chose aisée, et les réseaux sociaux le savent bien. Sur Instagram, la thématique a cumulé 62 millions de vues pour un peu plus de 3.600 publications durant l’année 2025, selon les données de Visibrain (nouvelle fenêtre), plateforme de veille des réseaux sociaux. Sur TikTok, rien qu’entre novembre et décembre, les vidéos sur la thématique du sommeil ont cumulé près de 10 millions de vues.
Dès lors, il peut être tentant de se tourner vers ces contenus pour dénicher l’astuce à laquelle on n’avait pas pensé. Pourtant, certains d’entre eux s’avèrent souvent inutiles, d’autres fois même dangereux. L’année dernière par exemple, le curieux phénomène du « mouth taping » (nouvelle fenêtre), popularisé par des sportifs de haut niveau, préconisait sans aucun fondement scientifique de se scotcher la bouche avant de trouver le sommeil pour mieux dormir en respirant par le nez.
En partenariat avec l’Inserm (nouvelle fenêtre), l’équipe des Vérificateurs a exploré les conseils les plus redondants, et les a soumis à Armelle Rancillac (nouvelle fenêtre), neurobiologiste au Collège de France et spécialiste du sommeil.
Faire du sport avant de se coucher, une fausse bonne idée ?
Parmi les conseils les plus redondants, pratiquer une activité sportive avant de se coucher est toujours à la mode. Certains affirment que cela permettrait au « rythme cardiaque et à la pression artérielle de retrouver un rythme normal »
, favorisant l’endormissement. D’autres promeuvent même, sous le hashtag #CourirAvantDeDormir, la course de nuit (nouvelle fenêtre), laquelle permettrait de trouver le sommeil.
Ces conseils ne se basent pas sur rien, comme le rappelle Armelle Rancillac : « L’activité physique est globalement bénéfique pour le sommeil et le consolide, car elle fait augmenter la température interne, ce qui mécaniquement la fera plus descendre pendant la nuit suivante et ainsi le consolidera ».
Cependant attention : ce conseil n’est valable que si l’on fait du sport régulièrement, à la même heure, en milieu de journée et plutôt en extérieur pour bénéficier de la lumière naturelle. Faire du sport trop proche de son heure de coucher peut même être totalement contre-productif. « Des séances de sport se terminant environ 4 heures avant le coucher, en particulier lorsqu’elles sont cardio, sont associées à une altération du sommeil »
, comme l’a notamment montré cette étude (nouvelle fenêtre).
Et s’il n’a pas été possible de pratiquer sa séance plus de 4 heures avant le coucher ? Pas de miracle, mais Armelle Rancillac conseille de prendre une douche froide qui peut aider à refroidir le corps, puis « de terminer par du chaud pour faciliter la dilatation des vaisseaux cutanés qui permettront la perte de chaleur de l’intérieur de votre corps ».
La lumière rouge aide-t-elle vraiment à l’endormissement ?
Sur les réseaux sociaux, certains affirment aussi que la lumière rouge des écrans serait parfaite pour l’endormissement. Certaines prennent même comme preuve des vidéos de compagnies aériennes (nouvelle fenêtre) qui utiliseraient cette méthode dans leurs avions pour bercer les passagers. D’autres en font même un argument commercial (nouvelle fenêtre) pour vendre leur produit.

Dire que la lumière rouge aide à dormir est pourtant une idée reçue. « Le bénéfice vient surtout d’une diminution de l’effet de la lumière bleue »
, nuance Armelle Rancillac. Car l’effet de la lumière sur le sommeil repose sur la stimulation des cellules à mélanopsine de la rétine, qui sont sensibles à la longueur d’onde bleue ou turquoise. Ainsi, « réduire cette composante en passant par des filtres ou des teintes plus chaudes réduit l’effet retardateur de la lumière sur l’endormissement ».
Des études (nouvelle fenêtre) ont même montré qu’à forte intensité, même une lumière plus chaude que le bleu peut aussi perturber l’endormissement.
Ainsi, la lumière rouge ne possède pas d’effet prouvé sur la qualité de notre sommeil. Si elle peut donner une sensation de relaxation, les rares études suggérant de légers effets sur l’horloge biologique (nouvelle fenêtre) ont été menées sur des effectifs très faibles et ont eu des résultats variables.
Booster sa mélatonine, attention danger
La plupart des conseils pour « bien dormir » tournent autour de la mélatonine, une hormone naturellement produite par la glande pinéale dans le cerveau et libérée surtout la nuit pour signaler au corps qu’il est temps de dormir et aider à maintenir le sommeil. L’augmenter, même artificiellement, assurerait ainsi une bonne nuit. On trouve donc sur les réseaux sociaux des comptes proposant des gommes à mâcher en vente libre.
D’emblée, Armelle Rancillac rappelle que « la mélatonine n’agit pas comme un somnifère, elle est plutôt utile dans certains contextes comme le décalage horaire mais également les retards de phase du sommeil, très prévalents chez l’adolescent »
. Ainsi, la mélatonine peut être un traitement très efficace chez des personnes dont l’horloge biologique n’est pas synchronisée sur une journée classique. Certaines revues de la littérature scientifique soulignent aussi que ces compléments peuvent être bénéfiques pour raccourcir un peu le temps d’endormissement, surtout chez les sujets de plus de 55 ans.
À condition, toutefois, de ne pas le faire n’importe comment : « On manque encore de recul quant à son usage, et la mélatonine a de nombreux effets indésirables comme des céphalées, des vertiges, de la fatigue, ou des troubles de l’humeur. Ces gommes ne sont pas des bonbons »
,
prévient la chercheuse. Depuis 2018, l’Anses a d’ailleurs émis une alerte (nouvelle fenêtre) expliquant que les femmes enceintes, les adolescents ou les personnes souffrant de maladies inflammatoires ou d’asthme ne devaient en aucun cas consommer de la mélatonine sans avis médical. Elle déconseille également de consommer ce type de produit avant de réaliser une activité nécessitant une vigilance soutenue, car « une somnolence pourrait entraîner de graves conséquences »
.
Quels conseils fonctionnent vraiment ?
Armelle Rancillac explique entendre régulièrement d’autres conseils peu utiles : manger un kiwi avant de se coucher (nouvelle fenêtre) par exemple, une « astuce » qui se fonde sur des tests effectués sur de faibles effectifs avec des mécanismes non démontrés. « La sérotonine alimentaire ne traverse pas la barrière hémato-encéphalique, elle ne peut donc pas agir comme neuromédiateur central du sommeil »,
répond la chercheuse.
Car en réalité, pour dormir, il n’y a pas réellement de secret : l’Institut national du sommeil et de la vigilance (nouvelle fenêtre) rappelle que la régularité des rythmes de lever et de coucher, l’exposition à la lumière du jour – surtout le matin –, ou l’obscurité dans la chambre à coucher sont les facteurs principaux du sommeil. Pratiquer régulièrement du sport en journée, ne pas manger trop gras et trop proche de l’endormissement complètent la liste des conseils.
Enfin, des contenus en ligne peuvent-ils aider à s’endormir ? Pour Armelle Rancillac, même si ces derniers sont clivants, l’ASMR (« Autonomous Sensory Meridian Response ») peut présenter des bénéfices : « se laisser bercer et écouter des sons doux aide à la détente et à déconnecter des préoccupations diurnes, ce qui est essentiel au lâcher-prise associé au sommeil »
. À condition d’éviter l’exposition à la lumière du téléphone, qui peut, là encore, retarder l’endormissement.
Vous souhaitez nous poser des questions ou nous soumettre une information qui ne vous paraît pas fiable ? N’hésitez pas à nous écrire à l’adresse lesverificateurs@tf1.fr. Retrouvez-nous également sur X : notre équipe y est présente derrière le compte @verif_TF1LCI.




