La cour criminelle du Var a condamné, vendredi 22 novembre, un homme de 38 ans à vingt ans de réclusion criminelle, la peine maximale, pour avoir régulièrement violé sa fille adolescente et l’avoir livrée à des inconnus, qui la violaient. La condamnation du père a été assortie d’une période de sûreté des deux tiers.
Dans cette affaire qui, par certains aspects, rappelle celle des viols de Mazan jugée à Avignon, le seul de ces violeurs identifié par les enquêteurs, qui comparaissait libre, a été condamné à seize ans de réclusion criminelle, avec mandat de dépôt. Des condamnations conformes aux réquisitions de l’avocate générale, Estelle Bois.
Depuis mercredi, le procès a mis en exergue l’emprise du père sur sa fille, dont il contrôlait les fréquentations, les sorties ou les réseaux sociaux. Il a commencé à lui imposer des relations sexuelles fréquentes alors qu’elle n’avait que 13 ans, mêlant cajoleries, insultes et menaces.
Des agresseurs recrutés sur des sites
Il l’a aussi également livrée à d’autres hommes, souvent beaucoup plus âgés, recrutés sur des sites de petites annonces, comme Wannonce. Sur ce site, il prétendait qu’ils étaient un couple de 26 et 20 ans cherchant à assouvir un fantasme. Les yeux bandés, la jeune fille devait se soumettre aux désirs de ces hommes en présence de son père, qui dirigeait, participait et filmait.
Le second accusé, un sexagénaire sans antécédent judiciaire, père de six enfants, a été confondu grâce à la géolocalisation de l’une des nombreuses photos et vidéos pornographiques de l’adolescente retrouvées sur les appareils du père. La tête basse, il a déclaré devant ses juges avoir été piégé, assurant avoir adhéré à l’histoire du fantasme de domination d’un couple d’adultes, sans demander par la suite le consentement de la jeune fille puisque l’homme qui l’accompagnait le lui donnait.
Sur les photos diffusées à l’audience, le jeune âge et la détresse de l’adolescente ne font pourtant pas de doute. « Les choses ont mal tourné. Au lieu de réagir en homme responsable, il est allé au bout de son plaisir et il a fermé les yeux », a reconnu son avocat, Me Christophe Mairet, tout en insistant pour que le verdict distingue les viols répétés du père et l’heure d’égarement de son client.
« Il ne s’agit pas d’amour, mais de pouvoir »
Le père a reconnu les faits et promis de ne pas faire appel. « Après trois ans de détention, j’ai eu le temps de réfléchir », a-t-il expliqué. Pourtant, pendant l’instruction, et encore au cours de l’audience, il n’a cessé d’évoquer une relation sentimentale avec l’adolescente, qui n’était pas sa fille biologique mais qu’il a reconnue et élevée. Il a ainsi soutenu n’avoir fait que céder à ses demandes.
« Il ne s’agit pas d’amour, mais de pouvoir et de domination », a tonné l’avocate générale, Estelle Bois. « Il n’aime pas [sa fille], il aime avoir tous les pouvoirs sur elle, qu’elle lui appartienne, qu’elle lui obéisse ». « A ce moment, cette relation père-fille me paraissait normale », a raconté la jeune fille, accompagnée pendant trois jours par Neige, un golden retriever mis à sa disposition pour la première fois au tribunal de Draguignan par une association d’aide aux victimes.
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Il y a trois ans, c’est elle qui avait mis fin à son calvaire en s’enfuyant, alors que les violences et les humiliations allaient crescendo. Une nuit d’août 2021, à Cavalaire-sur-Mer, une passante en vacances la voyant courir en pleurs l’avait abordée, écoutée et prise en charge, jusqu’à l’accompagner chez les gendarmes alors que le père multipliait appels et textos. Désormais âgée de 18 ans, la jeune fille regarde de l’avant et souhaite « fermer le livre et passer à autre chose », grâce à un petit copain de son âge et à un projet de CAP coiffure.