Devant le tribunal, il n’a pas su expliquer pourquoi. « Je regrette. C’est arrivé au dépourvu », bredouille Thomas Q. L’homme de 24 ans comparaissait, jeudi 19 septembre, devant le tribunal de justice de Paris pour avoir, alors qu’il était gardien de la paix au centre de rétention administrative (CRA) de Vincennes (Val-de-Marne), fourni plusieurs étrangers en résine de cannabis et en téléphones.
Des faits qu’il reconnaît et qu’étaie l’enquête pénale. Le gardien de la paix a notamment été vu entrer et sortir, seul, de plusieurs chambres du CRA. Des sachets de cannabis ont été retrouvés dans l’une des chambres, de même que des téléphones avec des messages compromettants que des retenus échangeaient avec lui, mentionnant une « livraison ».
C’est le soir, à son domicile, que Thomas Q. a reçu de la drogue, une dizaine de fois, entre juin 2023 et mars 2024, selon ce qu’il a admis. Les dealeurs arrivaient en VTC et fournissaient par l’intermédiaire du policier différents étrangers placés au CRA. Sur chacune de ces transactions, le policier aurait touché une commission de 200 euros.
« Vous expliquez que vous étiez en proie à des difficultés financières », rapporte le président d’audience. La naissance de jumeaux, un loyer de 600 euros, alors qu’il s’était séparé de sa compagne – elle-même policière –, un crédit à la consommation… « Il sort beaucoup, fume des stupéfiants », a ajouté son avocate, Françoise Pentier.
« Ça ne se reproduira pas »
Thomas Q. touchait un salaire de 1 700 euros net par mois. Il avait été affecté au CRA de Vincennes à sa sortie d’école, en mai 2022. « Ce qui signifie qu’il était en bas du classement », fait remarquer Me Pentier, qui décrit son client comme un jeune immature et timide, fraîchement débarqué de la Martinique.
« Vous paraissez un peu à côté des faits, anesthésié. J’ai l’impression que vous ne prenez pas conscience de ce qu’il se passe, l’interpelle la procureure. Sans vous ce trafic n’était pas possible. » Thomas Q. fait, au contraire, valoir qu’un retenu lui aurait dit : « Il y en a qui le font déjà. T’inquiète », une façon de dire que la corruption des agents n’était pas inédite en ces lieux où les étrangers sans papiers sont placés avant leur expulsion. « Au CRA, les stupéfiants circulent, comme en prison », appuie l’avocate du policier, qui souligne que son client « paie aussi peut-être le fait qu’il ne s’est pas intégré dans son équipe ».
D’une voix basse, presque étouffée, Thomas Q. promet que « ça ne se reproduira pas ». Il a été suspendu, à titre conservatoire, par son administration. Jeudi, le tribunal l’a condamné à douze mois de prison avec sursis et à une interdiction d’exercer la fonction de policier pendant cinq ans.
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