dimanche, mai 19

Elle était devenue l’un des visages phares du soulèvement « Femme, vie, liberté » qui a traversé l’Iran pendant des mois, en 2022. Les vidéos montrant l’adolescente iranienne Nika Shakarami, âgée de 16 ans, en train de danser et de chanter ont fait le tour du monde. Elle a disparu, le 20 septembre 2022, pendant une manifestation suivant la mort de Mahsa (Jina) Amini lors d’une garde à vue pour un voile mal ajusté, quatre jours plus tôt. Sa famille a retrouvé le corps sans vie de Nika neuf jours plus tard dans une morgue, le visage et la tête déformés. Les autorités iraniennes, elles, n’ont cessé, dès le premier jour, de parler du suicide comme cause de son décès. Ce que la famille de Nika Shakarami a toujours contesté.

Désormais, un documentaire glaçant, diffusé le 30 avril sur la BBC World Service, intitulé « Le dernier souffle de Nika », démontre, preuves à l’appui, que l’adolescente a été agressée sexuellement et battue pendant son arrestation, avant d’être tuée par trois agents appartenant aux gardiens de la révolution, l’armée idéologique du pays. Jamais auparavant de tels détails n’avaient été révélés sur les traitements infligés par l’appareil sécuritaire iranien à une personne arrêtée. La diffusion de ce documentaire a provoqué un tollé au sein du régime, qui tente, par la voix de certains de ses officiels, de discréditer ce film, en publiant d’autres documents censés appuyer la thèse du suicide de la jeune fille.

Les documents obtenus par la BBC, portant la mention « hautement confidentiels », comprennent des comptes rendus des auditions de tous les agents qui seraient impliqués dans le décès de Nika Shakarami et des cadres supérieurs qui auraient tenté de dissimuler l’incident, ainsi que leurs noms.

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Matraques et tasers

Selon les documents obtenus par la BBC, Nika Shakarami est identifiée au cours d’une manifestation comme une potentielle « leader » et donc suivie par les agents des services secrets, infiltrés parmi les manifestants. Arrêtée, la jeune fille est placée à l’arrière d’une camionnette réfrigérée. Bien que menottée, elle continue à se défendre en donnant des coups de pied et en insultant les trois agents qui sont avec elle dans le véhicule. Le chef de l’unité est devant, avec le conducteur. L’équipe tente de trouver un centre de détention dans lequel placer l’adolescente.

Les trois agents la font s’allonger sur le sol de la camionnette. L’un d’eux s’assoit sur elle, soi-disant pour l’empêcher de bouger. Le même homme, selon l’un de ses camarades, glisse sa main dans le pantalon de la jeune fille, qui se débat. Ensuite, « le contrôle de la situation nous a échappé », déclare, lors de son audition par les gardiens de la révolution, un autre des trois agents, selon les documents obtenus par la BBC. Tous commencent à donner des coups de matraque et de poing à la jeune fille. Le rapport précise : « Trois matraques et trois tasers ont été utilisés. On ne sait pas exactement quel coup a causé la mort. »

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