mercredi, juillet 3

C’est la Hongrie qui s’apprête à prendre la présidence tournante de l’Union européenne ce 1ᵉʳ juillet.
Hostile notamment à l’aide à l’Ukraine, Viktor Orban inquiète ses partenaires européens.
À la veille du début de la présidence, le Premier ministre hongrois a initié le lancement d’un nouveau groupe parlementaire d’extrême droite.

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Plus de deux ans de guerre en Ukraine

C’est une information passée inaperçue en France, où le premier tour des législatives anticipées le 30 juin a focalisé toute l’attention. Le 1ᵉʳ juillet, et pour six mois, la Hongrie prend la tête du Conseil de l’Union européenne. S’il a promis d’assumer ce rôle de médiateur de façon « impartiale », le retour du Premier ministre Viktor Orban met Bruxelles sous tension. 

L’eurosceptique magyar avait certes déjà assumé la présidence tournante de l’Union en 2011 avec une rudesse revendiquée, mais dans un contexte très différent. Avec l’enjeu de la guerre en Ukraine, pour laquelle Viktor Orban s’aligne plus volontiers sur Moscou que sur Kiev, et avec l’entrée au Parlement européen d’un fort contingent de députés populistes, le voir incarner l’UE pour le semestre qui s’ouvre fait grincer des dents.

Von der Leyen, une reconduction pas encore acquise

Ursula Von der Leyen ne se déplacera pas. La présidente du Conseil de l’Europe depuis 2019 devait se rendre à Budapest cette semaine pour lancer la présidence hongroise, mais a repoussé sa visite sine die. Tacitement reconduite le 27 juin par les chefs d’État de l’UE, malgré l’opposition d’Orban, la chrétienne-démocrate devra encore en passer par un vote du Parlement pour espérer un nouveau mandat en décembre prochain. Si elle est certaine des suffrages du groupe de droite (le PPE), et vraisemblablement des Libéraux (Renew Europe), le soutien des socialistes et démocrates (S & D) est beaucoup plus conditionnel. Tout compromis avec des parlementaires d’extrême-droite pourrait lui coûter cet appui vital, ont toujours prévenu les députés de gauche, deuxième force politique de l’hémicycle. 

« Patriotes pour l’Europe »

Ce dimanche 30 juin, à la veille même de son accession à la présidence tournante de l’UE, Viktor Orban vient justement de lancer une initiative pour fédérer plusieurs partis d’extrême-droite, qui ont obtenu plus de sièges lors des élections européennes, sans bouleverser jusqu’ici les équilibres, ni la domination du PPE. Les « Patriotes pour l’Europe », pour parvenir à se constituer en groupe, doivent fédérer au moins 25 parlementaires, issus d’au moins sept pays différents de l’Union. 

Orban cherche pour cela à se rapprocher notamment du FPÖ autrichien, et du parti tchèque ANO, qui lui fourniraient les contingents nécessaires, en espérant des ralliements ultérieurs venus d’au moins quatre autres pays. Le manifeste de ce possible nouveau groupe préconise explicitement la fin de l’aide militaire à l’Ukraine, contre « l’immigration illégale », et pour « la famille traditionnelle ». Si elle a globalement gagné des sièges lors des Européennes de juin dernier (tandis que le parti de Viktor Orban en a perdu), l’extrême-droite avance jusqu’ici en ordre dispersé au Parlement. Pour rejoindre le groupe souhaité par le Premier ministre hongrois, le parti tchèque quitterait d’ailleurs celui d' »Identité et Démocratie », dominé par le Rassemblement national français et la Lega italienne.

Le blocage de l’aide à l’Ukraine par la Hongrie aura été le point de désaccord le plus marqué d’Orban avec les autres chefs d’État de l’UE. C’est le premier motif d’appréhension à l’approche de la présidence hongroise, désormais conjugué à l’affaiblissement d’Emmanuel Macron, un des principaux avocats de la cause ukrainienne en Europe. Reste que « la marge de manœuvre de Viktor Orban est limitée », comme l’a expliqué à l’AFP Daniel Hegedus, chercheur au centre de réflexion German Marshall Fund. Si le Premier ministre hongrois annonce des « priorités » pour son mandat, comme la lutte contre l’immigration illégale ou la « compétitivité économique », son action réelle pourrait être entravée par la lente mise en place du nouveau Parlement sur les six premiers mois. 

Son influence véritable tient surtout à la communication qui va porter son agenda, estime Daniel Hegedus, qui relève déjà des « provocations » de ce côté-là, dont Viktor Orban est coutumier depuis toujours. Il a ainsi choisi pour slogan de sa présidence « Make Europe Great Again », paraphrasant le célèbre « Make America Great Again » de Donald Trump. Un clin d’œil à son ami populiste américain, en bonne position pour retourner à la Maison-Blanche l’an prochain, et qui d’ailleurs ne cesse de chanter ses louanges outre-Atlantique.


Frédéric SENNEVILLE

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