Les actions se multiplient chez les agriculteurs, qui dénoncent la hausse des coûts.
La profession ne leur permet plus de vivre, avec de grandes disparités de revenus.
La colère gronde et pourrait s’étendre à tout le pays. Imitant leurs collègues roumains, allemands ou néerlandais, les agriculteurs français veulent faire entendre leurs revendications par des actions coup de poing. Avec pour ambition de dénoncer l’injustice des normes européennes, mais aussi la hausse des prix des carburants. La réalité de la profession est bel et bien difficile : peu d’exploitants tirent une majorité de ressources de leur activité et celle-ci est de moins en moins rémunératrice au fil des années.
Une profession de moins en moins payante
Dans une note de 2022, le ministère de l’Agriculture souligne qu’« en 30 ans, le revenu net de la branche agricole a baissé de près de 40 % en France en euros constants » et que « dans le même temps, le nombre d’exploitations agricoles a diminué de 60 % avec des évolutions importantes des structures juridiques ». En effet, les agriculteurs peuvent de moins en moins se rémunérer. D’après une étude de l’Insee de 2021, à partir de chiffres de 2018, si « le revenu disponible moyen annuel des ménages agricoles s’élève à 52.400 euros », seulement « un tiers provient de l’activité agricole, soit 17.700 euros ».
La profession agricole ne rapporte plus suffisamment et 18% des membres des ménages agricoles vivent d’ailleurs sous le seuil de pauvreté en France, davantage que les membres des autres ménages ayant une activité (13%). En réalité, les agriculteurs tirent des bénéfices d’autres activités pour vivre, en majorité du salaire de leur conjoint.
Par ailleurs, tous les exploitants agricoles ne touchent pas les mêmes revenus selon la nature de leur activité. C’est le second point majeur de cette étude de l’Insee, selon laquelle « les revenus agricoles sont plus faibles dans les territoires d’élevage que dans ceux de production végétale ». S’ils sont les plus faibles chez les producteurs de bovins viande, ils sont nettement plus élevés chez les viticulteurs. « En 2018, les revenus générés par l’activité agricole des ménages des territoires viticoles sont 1,9 fois supérieurs à ceux des territoires d’élevage bovin », selon l’Insee.
Là encore, les producteurs bovins tirent moins de ressources de leur activité puisqu’ils « gagnent en moyenne 38.060 euros, dont seulement 11.340 sont issus de l’activité agricole », soit seulement 30%. À l’inverse, les viticulteurs peuvent compter sur une plus grande quantité de bénéfices, avec 40% de leurs ressources provenant de leur culture (28.200 euros). C’est aussi le cas des producteurs laitiers, chez qui « les revenus agricoles sont en moyenne de 17 000 euros en 2018 et ils constituent 38 % des revenus des ménages agricoles ».
Dans son rapport de 2022, le ministère de l’Agriculture ne prédit pas une amélioration du pouvoir d’achat des agriculteurs, qui vont être obligés de « faire évoluer leurs systèmes et pratiques et à faire face à des perspectives de coûts de production à la hausse ». À ce titre, le ministère formule plusieurs recommandations, dont celles de mieux « prendre en compte la diversité des systèmes », de « renforcer les compétences des agriculteurs », ou encore de réguler le marché.