Les grincheux diront que c’est un train serbe qui arrive à l’heure, alors à quoi bon épiloguer ? Les autres se refusent à banaliser les chiffres. Dimanche 10 septembre, Novak Djokovic disputait à l’US Open sa 36e finale en 72 Grands Chelems (une sur deux, donc). Sa dixième lors de ses 11 derniers Majeurs. Sa quatrième de l’année. Et, pour la 24e fois de sa carrière, le Serbe est reparti avec le trophée d’un des quatre plus prestigieux tournois de la saison, vainqueur de Daniil Medvedev (6-3, 7-6 [7/5], 6-3).
Vingt-quatre, comme le numéro de maillot de la légende de la NBA Kobe Bryant, décédé accidentellement en 2020, à qui Djokovic a dédié symboliquement sa victoire, avant de recevoir le trophée : « Nous étions proches, il était toujours disponible pour me donner des conseils, à un moment où je bataillais pour revenir à mon meilleur niveau, nous avions beaucoup discuté de ce qui fait la mentalité des gagnants. »
Le dénouement de la quinzaine entre les numéros 2 et 3 mondiaux n’a été qu’un set durant à la hauteur des promesses, dans un remake de la finale 2021 qui avait vu le grand Russe dégingandé (1,98 m) soulever son premier et unique trophée du Grand Chelem. Mais le contexte, cette année, n’avait plus rien à voir.
Il y a deux ans, Djokovic était à une marche du Graal ultime en tennis : remporter les quatre levées du Grand Chelem sur une année civile. Signer le Grand Chelem calendaire, c’était s’aventurer sur des cimes seulement explorées par l’Australien Rod Laver dans l’ère Open (à partir d’avril 1968, où les tournois s’ouvrèrent aux professionnels et amateurs confondus). Ce 12 septembre 2021, le robot serbe reprend tout à coup forme humaine, rattrapé par le poids de l’histoire, qui d’habitude le transcende. Lors du dernier changement de côté, voyant son rêve lui échapper, il fond en larmes sous sa serviette. Le roi mal-aimé reçoit une ovation inédite de la part d’un public qui lui a toujours préféré Roger Federer et Rafael Nadal.
En 2021, toujours, Djokovic était arrivé à Flushing Meadows essoré par la grand-messe olympique à Tokyo. Cette fois, il n’a disputé – et gagné – que le tournoi de Cincinnati en guise de préparation. Ce qui n’avait pas échappé à la sagacité de Medvedev, qui s’attendait à voir arriver sur le court un Djokovic revanchard. « La seule façon dont je peux [me servir de] la finale de 2021 est de penser que Novak, lorsqu’il perd, n’est plus le même, il a une mentalité différente. (…) Je dois donc m’attendre à ce qu’il soit dix fois meilleur qu’il ne l’était ce jour-là. Et si je veux le battre, je dois être dix fois meilleur que je ne l’étais ce jour-là », résumait le joueur de 27 ans vendredi.
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