Ligue 1 : nouvel orage autour du symbole du maillot floqué d’un arc-en-ciel

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« Homo ou hétéro, on porte tous le même maillot », affirme le slogan. Tous ? Non. Une poignée de joueurs de Ligue 1 et Ligue 2 ont marqué leur refus de revêtir le maillot au flocage arc-en-ciel institué par la Ligue de football professionnel (LFP) à l’occasion du week-end de lutte contre l’homophobie dans le football. Après le défenseur de Guingamp Donatien Gomis (Ligue 2), samedi, plusieurs joueurs devant disputer la rencontre entre Toulouse et Nantes, dimanche 14 mai, n’ont pas figuré sur la feuille de match, en raison de leur refus d’arborer la tunique de leur équipe aux couleurs LGBT.

Un an après le milieu de terrain Idrissa Gueye, alors au Paris Saint-Germain, fortement soupçonné d’avoir déclaré forfait pour ne pas porter ce maillot, la question continue de défrayer la chronique en Ligue 1. Si l’immense majorité des joueurs de L1 et L2 ont revêtu le maillot lors de la 35e journée du championnat, de rares cas isolés entachent la journée de mobilisation mise en place par la Ligue.

En 2021, l’international sénégalais s’était fait porter pâle en avançant une gastro-entérite. Il n’avait pas avancé d’explication en 2022, son entraîneur d’alors, Mauricio Pochettino évoquait des « raisons personnelles », tout en reconnaissant que son joueur « n’était pas blessé ». Un an plus tard, le Toulouse football club (TFC) a choisi, lui, de communiquer sur l’absence de plusieurs de ses joueurs. « Des joueurs de l’effectif professionnel ont exprimé leur désaccord concernant l’association de leur image aux couleurs arc-en-ciel représentant le mouvement LGBT, écrit le récent vainqueur de la Coupe de France, dimanche dans un communiqué.
Bien que respectueux des choix individuels de ses joueurs, et après de nombreux échanges, le [club] a choisi d’écarter lesdits joueurs pour la rencontre »
face à Nantes.

« Un message de diversité »

Le TFC n’a pas précisé l’identité des joueurs « écartés » – ce qu’ils souhaitaient –, mais Zakaria Aboukhlal, Saïd Hamulic et Moussa Diarra n’étaient pas sur la feuille de match face à Nantes. Dans cette revanche de la finale de Coupe de France (remportée par Toulouse), l’attaquant égyptien du FC Nantes, Mostafa Mohamed, n’y figurait pas non plus. Selon L’Equipe, le staff nantais n’aurait appris qu’une demi-heure avant d’annoncer la composition d’équipe que son joueur refusait de participer au match ; la situation réveillant des pressions subies par sa famille quand il avait choisi de rompre le jeûne du ramadan les jours de match pour pouvoir jouer. Par conséquent, Mostafa est resté à l’hôtel pendant que ses partenaires rejoignaient le Stadium de Toulouse.

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Dans un message posté sur ses réseaux sociaux, Zakaria Aboukhlal a justifié son absence, dimanche soir. Insistant tenir en « plus haute estime chaque individu, quels que soient ses préférences personnelles, son genre, sa religion ou son vécu », l’attaquant marocain né aux Pays-Bas estime « ne pas être la personne la plus appropriée pour participer à cette campagne ». Et ajoute que « le respect est une valeur que j’estime beaucoup. Il s’étend aux autres mais comprend également le respect de mes propres croyances personnelles. »

Lire l’entretien (en 2022) : « Si un joueur déclarait son homosexualité, il serait soutenu par l’ensemble du football »

Outre les maillots floqués aux couleurs de l’arc-en-ciel, les capitaines, arbitres et entraîneurs arboraient un brassard similaire ce week-end. Et le club de Montpellier a modifié les couleurs de son maillot – jusqu’au logo – pour l’orner des couleurs LGBT. Une manière pour le football français de diffuser « un message de diversité, d’espoir et d’amour […] d’un football qui nous fait vibrer et qui doit être ouvert à tous », précisait la LFP, jeudi, dans un communiqué – dans un pays où l’homophobie est un délit.

Un phénomène qui dépasse le football

Si la Ligue organise chaque année depuis cinq ans « une journée dédiée à la sensibilisation du grand public », à l’occasion de journée internationale de lutte contre l’homophobie (le 17 mai), les règles demeurent floues concernant les éventuels joueurs refusant de se « porter le même maillot » – souvent pour des raisons religieuses. Et les quelques clubs concernés gèrent la situation à leur manière. « Donatien Gomis a fait part de son choix de ne pas porter ce maillot. Nous en avons pris acte », a ainsi réagit le président de l’En avant Guingamp, Fred Le Grand, dans les colonnes du Télégramme, samedi ; là où Toulouse a annoncé écarter les joueurs en question.

Une fois encore, une poignée d’absents éclipse l’immense majorité des joueurs – de toutes confessions – ayant enfilé le symbolique maillot au cours du week-end. A commencer par les stars du PSG, Kylian Mbappé, Lionel Messi ou Ashraf Hakimi face à Ajaccio samedi.

Kylian Mbappé et Lionel Messi lors du match entre le PSG et Ajaccio, samedi 13 mai 2023 au Parc des Princes.

Soulignant que la majorité des joueurs « a joué avec [ce maillot], et a montré l’exemple auprès des jeunes, au football amateur », alors que les clubs « ouvrent leurs portes pour venir sensibiliser à la lutte contre l’homophobie », l’ancien footballeur Yoann Lemaire, président de l’association Foot Ensemble, a néanmoins insisté dimanche qu’« on a sous-estimé le problème. »

Parmi les initiateurs de ce week-end, celui qui était devenu, en 2004, le premier footballeur français à témoigner de son homosexualité a reconnu sur RMC être accablé par le choix de certains joueurs, sans être totalement surpris. « On s’y attendait quand même, qu’un certain nombre de joueurs ne voudraient pas jouer avec ce maillot. On en a rencontré pas mal cette année, que ce soit dans les centres de formation ou chez les joueurs professionnels ».

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Avec d’autres associations, l’ancien joueur est allé à la rencontre des joueurs, professionnels ou en centre de formation, faire de la sensibilisation à la lutte contre l’homophobie. Et insiste que les réactions rencontrées ce week-end « ne concernent pas que le football, mais aussi la vie de tous les jours ». Comme souvent, le football reflète la société dans laquelle il évolue.

Lire l’article (en 2019) : « Etre homo dans le foot, c’est plus difficile que dans d’autres sports »

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