Près de 1,4 milliard d’euros. C’est la somme qui devrait être engagée par l’État et les départements pour revaloriser, chaque année, les salaires des professionnels de la filière socio-éducative (domaines du handicap, de la protection de l’enfance, de l’hébergement, de l’autonomie, etc.), d’après Matignon. Un montant qui fait encore l’objet d’arbitrages au sein du gouvernement, et qui devrait être annoncé officiellement par Jean Castex, ce vendredi 18 février dans la matinée, lors de la conférence des métiers de l’accompagnement du social et médico-social.
Actuellement, dans le secteur, “les niveaux de salaires sont très faibles et les grilles peu dynamiques, assez anciennes et ne permettent pas une transversalité des parcours et des carrières”, admet le cabinet du Premier ministre, qui se fonde sur des travaux réalisés par Denis Piveteau, ancien directeur de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, ainsi que Jean-Philippe Vinquant, ancien directeur général de la cohésion sociale jusqu’en 2019 et Benjamin Ferras, ancien directeur adjoint de cabinet de Marisol Touraine en 2016 et 2017. Par ailleurs, la filière fait l’objet d’une “divergence des conventions collectives qui fragilise les carrières dans ces secteurs”, ajoute Matignon.
Face à ce constat, le gouvernement a donc décidé d’agir, en prévoyant des revalorisations quasi-immédiates (à compter d’avril 2022) pour les professionnels de la filière socio-éducative. Elles devraient correspondre à celles déjà mise en place pour les personnels soignants dans le cadre du Ségur de la santé, à savoir une augmentation de 183 euros net par mois pour chaque employé. En réalité, ces augmentations devraient être visibles sur les fiches de paie de juin, avec un effet rétroactif à compter d’avril.
Dans le détail, les métiers concernés par ces revalorisations sont pratiquement tous ceux annexés à l’accord Laforcade de mai 2021, portant sur la revalorisation des personnels soignants des structures pour personnes handicapées et des services de soins à domicile. On retrouve notamment les éducateurs spécialisés, les moniteurs éducateurs, les conseillers en économie sociale et familiale, les psychologues, les techniciens de l’intervention sociale et familiale, les assistants en services sociaux, ou encore les chefs d’atelier. “Le secteur de l’asile est également concerné”, précise Jean-Philippe Vinquant.
Ce sont plus précisément les professionnels de la filière socio-éducative exerçant dans le secteur privé non-lucratif et la fonction publique qui sont ciblés par ces revalorisations. Dans le privé non-lucratif, 140.000 professionnels en équivalent temps plein devraient être concernés. La mesure représenterait un coût global de 720 millions d’euros en année pleine, dont 480 millions assumés par l’État (70%) et 240 millions par les départements (30%). En 2022, année de mise en place partielle de la mesure, 540 millions d’euros devraient être investis (360 millions par l’État et 180 millions par les départements). Dans la fonction publique, 29.000 professionnels en équivalent temps plein devraient en bénéficier, pour un coût de 120 millions d’euros en année pleine (90 millions en 2022).
500 millions d’euros supplémentaires pour moderniser les grilles salariales
À noter que d’autres professionnels jusqu’ici “oubliés” du Ségur de la santé devraient également bénéficier de ces augmentations salariales : 9.000 soignants et 1.700 médecins en équivalent temps plein dans les services de protection maternelle et infantile (enveloppe globale de 60 millions d’euros, dont 70% seront engagés par l’État et 30% par les départements) ; 3.000 médecins coordonnateurs en Ehpad en équivalent temps plein (enveloppe globale de 40 millions d’euros financée par l’Assurance maladie) ; 20.000 aides à domicile en centre communal d’action sociale (surcoût de 40 millions d’euros en année pleine pour la nouvelle branche autonomie).
Seconde annonce que Jean Castex devrait faire, vendredi matin : l’État et les départements devraient réaliser un investissement supplémentaire de 500 millions d’euros pour accompagner l’harmonisation des conventions collectives dans la filière et donner un cadre de négociation avec les partenaires sociaux. Le but est notamment de moderniser les grilles salariales pour rendre plus attractifs ces métiers. “Le secteur est marqué par un dialogue social compliqué. […] Construire une nouvelle convention collective prend du temps. Mais un objectif raisonnable serait de définir des grands blocs de convention collective d’ici à deux ans”, détaille Jean-Philippe Vinquant. Ces grands blocs devraient porter sur la classification et la rémunération de ces métiers, sur le temps de travail, ou encore sur l’importance donnée à l’acquisition de nouvelles compétences. Actuellement, “les grilles ne font avancer qu’à l’ancienneté, sans prendre en compte la prise en compétences”, pointe l’ancien directeur général de la cohésion sociale.
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