Les scientifiques ont, depuis une dizaine d’années, mis au point des conditions de culture qui permettent à des cellules de s’auto-organiser dans l’espace comme elles le font lors du développement initial d’un organe du corps humain. Ainsi, des fragments de tissus qui miment partiellement l’architecture et certaines fonctions de l’organe cible peuvent être produits en laboratoire. Ils sont appelés organoïdes.
Ceux-ci suscitent beaucoup d’intérêt ces dernières années, du fait de leur potentiel à révolutionner les domaines de la biologie du développement, de la médecine régénératrice, de la découverte de médicaments et des traitements personnalisés. Puisqu’ils sont considérés comme des substituts des organes qu’ils représentent, ils constituent des modèles tout à fait pertinents pour explorer le monde complexe de la biologie humaine. Ils ont déjà joué un rôle essentiel dans la compréhension de la biologie du développement, dans la modélisation des maladies et dans l’analyse d’effets thérapeutiques et toxiques des médicaments, permettant aux chercheurs d’étudier les effets de mutations génétiques, de facteurs environnementaux et de traitements potentiels sur les cellules humaines.
Les organoïdes se sont également révélés précieux dans le domaine de la médecine personnalisée ; en effet, en utilisant des organoïdes dérivés de cellules de patients, il est possible de tester l’efficacité de médicaments dans le contexte d’un patrimoine génétique donné. Cela pourrait donc révolutionner la façon dont nous abordons le traitement de pathologies comme le cancer ou les maladies inflammatoires, en adaptant les thérapies aux besoins spécifiques de chaque individu.
Production plus ou moins reproductible
Dans un souci de communiquer ces avancées, la presse généraliste utilise volontiers le terme « mini-organes » (« minifoie », « minicerveau », etc.), or, cela conduit à répandre largement des idées erronées et à lancer de fausses promesses sur l’état actuel et le potentiel de cette technologie émergente. Il est essentiel de comprendre que les organoïdes ne sont pas des versions entièrement fonctionnelles et miniatures des organes.
Ils sont, à ce jour, majoritairement dépourvus de composants essentiels, tels que les vaisseaux sanguins, les cellules immunitaires, les neurones et certains types de cellules spécifiques, ce qui, associé à leur taille très réduite, les rend fondamentalement différents des organes complexes et entièrement fonctionnels que l’on trouve dans le corps humain. En outre, malgré un effort important d’harmonisation des protocoles, l’auto-organisation des organoïdes introduit une part aléatoire qui rend leur production plus ou moins reproductible selon les organes qu’ils imitent.
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