Les hommes ont-ils une horloge biologique ?

0
10

« Dépêche-toi ! » Cette petite voix, Vincent (certaines des personnes interrogées ont requis l’anonymat), 34 ans, professeur dans le Var, l’a entendue de plus en plus distinctement ces dernières années. Une alarme intime d’abord. « Je ressens une urgence car j’aspire profondément à être papa, j’ai ça dans le cœur », explique ce récent célibataire. « A 25-30 ans, j’avais beaucoup d’angoisses et la peur de les transmettre. Aujourd’hui je suis davantage prêt », estime-t-il. A ce timing personnel s’ajoutent quelques catalyseurs : les copains d’enfance devenus pères, les sous-entendus du sien – « quand tu seras un homme, Vincent » –, la confrontation avec la jeune génération lors d’une reprise d’études, ou la calvitie naissante. Par ailleurs, son attirance pour les femmes beaucoup plus âgées « qui ne sont pas dans les mêmes périodes de vie » n’aide pas. « Je prends conscience que le temps file », lâche cet « hypocondriaque », qui surveille son hygiène de vie mais n’a pas fait de test de fertilité. « J’ai une petite angoisse d’être stérile. »

Injonction sociale, processus psychologique, ultimatum physique, l’horloge biologique était jusqu’à présent le tribut des femmes, leur « popote interne », dixit l’humoriste Guillermo Guiz dans son sketch L’Enfant surprise. En ligne de mire : la baisse de la fertilité et le couperet de la ménopause. Les hommes, eux, semblaient préservés de ces considérations. Mais le recul de l’âge du premier enfant, les problèmes d’infertilité partagés à 50 % dans le couple et la chute de moitié de la quantité de gamètes dans le sperme en un demi-siècle les ont amenés à s’interroger. L’homme fertile à tout âge : mythe ou réalité ?

« C’est une idée reçue, véhiculée par les exemples médiatisés de paternités tardives », tranche Geoffroy Robin, gynécologue et andrologue au centre d’assistance médicale à la procréation (AMP) de Lille. Il rappelle que l’homme est sujet à l’andropause, une « baisse progressive de la testostérone », qui devient « significative à partir de 50 ans ». Or, celle-ci a un impact sur le délai de conception et le risque de fausse couche, « indépendamment de l’âge de la femme, mais avec un surrisque si elle a plus de 40 ans ».

Des risques pour le fœtus

En 2001, une étude d’Elise de La Rochebrochard, de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, précisait : « Pour l’homme, la fertilité est maximale à 30-34 ans, puis elle diminue lentement. A 55-59 ans, l’homme a une fertilité deux fois plus faible. » La chercheuse relevait également pour les pères âgés de plus de 40 ans « une augmentation du risque de maladies génétiques » de leur progéniture qui, pour certaines pathologies, est « de même ampleur que le risque de trisomie 21 observé chez les enfants dont la mère a un âge compris entre 35 et 39 ans ». Le docteur Robin reçoit des patients de plus de 55 ans persuadés que l’infertilité du couple vient de leur compagne, « puisqu’ils ont déjà eu des enfants d’une précédente union ». Il plaide pour « une information loyale et collective » du grand public. « Sans inquiéter !, tempère Florence Boitrelle, présidente de la Société d’andrologie de langue française (SALF). Les risques restent minimes en valeur absolue. Il s’agit surtout des hommes de plus de 60-70 ans. »

Il vous reste 70.19% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici