Le phénomène du « chemsex » (prononcez « kemsex »), mis sous le feu des projecteurs avec l’affaire Palmade, a surgi à la fin des années 2010. Il s’est amplifié pendant la crise sanitaire et les différents confinements. Contraction de chemical (« chimique ») et de sex, cette pratique consiste en la consommation de substances psychoactives dans le but d’avoir des rapports sexuels. « Cet usage ritualisé que l’on retrouve exclusivement chez des hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes [HSH] n’a rien à voir avec l’usage récréatif de produits comme l’alcool ou le cannabis… associé à la sexualité », précise d’emblée Jean-Victor Blanc, psychiatre addictologue à l’hôpital Saint-Antoine (AP-HP), qui a ouvert, il y a cinq ans, une consultation spécialisée en chemsex. Selon lui, entre 3 % et 5 % de la population consomme un psychotrope « récréatif » avant le sexe.
Longtemps, la pratique du chemsex a été considérée comme un épiphénomène, mais l’apparition des applications de rencontres géolocalisées à but sexuel, type Grindr, et des cathinones, nouvelles drogues de synthèse très bon marché (quelques dizaines d’euros) que l’on peut se faire livrer directement chez soi, ont amplifié son développement. Elles ont pour noms 3-MMC, 3-CMC, GHB, MDMA, méthamphétamine… et sont consommées par voie orale, intranasale ou en intraveineuse (« slam »). Leurs utilisateurs témoignent de l’augmentation de la libido et de la performance, de leurs effets désinhibants et entactogènes – qui augmentent la capacité d’empathie à l’égard des partenaires.
Si le phénomène a pris de l’ampleur, sa prévalence reste difficile à quantifier. En 2019, selon l’enquête sociologique Apaches (attentes et parcours liés au chemsex), réalisée par l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) pour la direction générale de la santé, de 13 % à 14 % des HSH avaient participé à une séance de chemsex au cours des douze derniers mois. Ce chiffre atteint 25 % à 30 % pour les utilisateurs d’applications de rencontres et entre 30 % et 50 % des patients suivis en maladies infectieuses. Des proportions qui en font un sujet de santé publique.
Des « chemsexeurs » en difficulté
Le rapport « Chemsex 2022 », remis le 17 mars 2022 à Olivier Véran, alors ministre de la santé, faisait état d’une méta-analyse regroupant 38 études, estimant la prévalence de cette pratique de 3 % à 29 % chez les HSH aux Etats-Unis et en Europe occidentale. « Grindr, une des principales applications de rencontres gay, revendiquait en 2020 plus de 500 000 utilisateurs en France, ce qui pourrait donner lieu à une estimation très grossière de 100 000 à 200 000 personnes potentiellement concernées », expliquaient les auteurs.
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