Un homme singe corpulent se débat, empêtré dans un film plastique qui l’étouffe. Vaincu, il finit par s’écrouler lourdement sur la scène. A côté de lui, pendant qu’il pousse ses derniers cris, une élégante femme blonde, frêle mais décidée, ponctue l’épisode d’une voix chantante où perce l’accent de son Ardèche natale : « Le plastique de votre barquette de frites, qu’il soit ou pas recyclé en chaise de jardin ou en sac de sport, viendra forcément grossir l’énorme réservoir de petites particules capables d’empoisonner nos corps et surtout ceux des générations à venir. » Une étonnante prestation pour une directrice de recherche à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) ! « J’en avais assez de seriner que le recyclage du plastique est un leurre, avec l’impression de ne pas être entendue. J’essaie de toucher le public par l’émotion », se justifie Nathalie Gontard, pionnière de l’emballage alimentaire écologique. Elle s’est ainsi produite avec deux comédiens au festival Bioviv’art, à Alénya (Pyrénées-Orientales), en août 2022.
Trente-cinq ans de recherche autour de la mise au point d’emballages alimentaires respectueux de l’environnement l’ont conduite à travailler sur le recyclage et les risques de la pollution aux particules de plastique. Depuis l’enfance, elle a une conscience écologique aiguë, forgée dans un milieu très simple, à la campagne. Seule de sa famille à obtenir le bac, elle enchaîne par un DUT en génie biologique à l’université de Montpellier. « Je voulais faire des études courtes et travailler vite, car mes parents n’avaient pas d’argent. » Mais Blas Tarodo de la Fuente, professeur en sciences des aliments et des bioproduits, la repère. Ce sera son mentor. Il l’inscrit à l’école d’ingénieurs Polytech Montpellier, puis la pousse vers la recherche.
Attirée par le secteur des emballages alimentaires, elle entre au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad), où elle restera de 1988 à 1998. A cette époque, elle est fascinée, un peu comme tout le monde, par le plastique, ce matériau souple, résistant et économique, si utile pour conserver les aliments. Mais elle s’interroge déjà sur sa persistance. Que deviendra-t-il une fois usagé ? Elle qui vient d’un monde rural, où les déchets organiques servent de fertilisants, perçoit l’étrangeté d’un produit qui ne se dégrade pas dans le milieu naturel. Sa thèse, soutenue en 1991, porte d’ailleurs sur les films plastiques biodégradables.
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