Dans quelle mesure les jeunes enfants exposés aux écrans voient-ils leur développement altéré ? En publiant une nouvelle étude dans The Journal of Child Psychology and Psychiatry, le 29 août, une équipe française relance ce brûlant débat.
L’étude, en effet, conduit ses auteurs à relativiser l’impact négatif des durées d’exposition à la télévision, aux ordinateurs, aux consoles de jeux, aux tablettes et aux smartphones sur le cerveau des enfants de 2 ans, de 3 ans et demi ou de 5 ans et demi. Ils qualifient même de « modeste » l’effet délétère de ces écrans, une fois pris en compte l’environnement familial et les modes de vie de l’enfant. Ces résultats à peine publiés, toutefois, leur interprétation divise les experts, certains alertant sur les dangers qu’il y aurait à minimiser les méfaits des écrans, loin d’être anodins.
« Le contexte d’utilisation des écrans jouerait un rôle important, sans doute plus que le seul temps passé devant les écrans », indique Jonathan Bernard, du Centre de recherche en épidémiologie et statistiques – Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) – Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) – universités Paris Cité et Sorbonne-Paris-Nord –, qui a dirigé cette étude.
Les auteurs ont analysé les données de près de 14 000 enfants suivis au sein de la cohorte française Elfe. Soit la première cohorte, en France métropolitaine, consacrée au suivi régulier des enfants nés en 2011 depuis leur naissance jusqu’à l’âge adulte.
Les chercheurs ont ensuite évalué le développement du langage de ces bambins à 2 ans, leur raisonnement non verbal à 3 ans et demi et leur développement cognitif global à 3 ans et demi et 5 ans et demi. Ils ont aussi mesuré le poids, dans ce développement, de nombreux autres facteurs liés au statut socio-économique de leur famille (niveau d’étude des parents, temps de travail, revenu, présence de frères et sœurs…), à l’enfant lui-même (sexe, âge gestationnel) et à ses activités quotidiennes (modes de garde, fréquence des activités partagées avec les parents, durée de sommeil, temps passé dehors, jeux sans écran…).
L’importance du cadre familial
Le temps d’exposition aux écrans nuit en effet au développement du cerveau de l’enfant, confirme cette équipe. Mais elle nuance ce constat : cette relation « apparaît beaucoup plus faible lorsque le cadre de vie familial est correctement pris en compte ». Selon les auteurs, l’impact des écrans sur le développement cognitif baisserait de 40 % à 80 % une fois le poids des facteurs familiaux éliminé, et de 10 % à 20 % supplémentaires une fois les autres activités de l’enfant prises en compte – un enfant qui lit beaucoup, par exemple, aura un meilleur développement cognitif qu’un enfant qui lit peu, toutes choses égales par ailleurs.
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