Lorsque, à la rentrée de septembre 2016, Adil Messaadi franchit la porte de l’université de Lille pour une première année commune aux études de santé (Paces), il n’imagine pas d’autre avenir professionnel que celui de soignant. Fils et frère de médecins généralistes, bachelier scientifique gratifié d’une mention très bien, il pense cocher toutes les cases d’une réussite prochaine. « Je n’ai alors que cette voie en tête », se souvient-il. La sélection drastique du numerus clausus, qui fixait chaque année, jusqu’en 2021, le nombre d’étudiants autorisés à suivre des études d’odontologie, va mettre à mal son rêve.
La déconvenue est à la mesure de son aspiration à devenir un professionnel de santé. « Dès les premières semaines, je sens que cela ne va pas marcher, témoigne Adil. Nous sommes 3 500 bons étudiants, pour 450 places, les amphithéâtres sont bondés, la concurrence règne, la pression est énorme, l’anxiété est presque palpable, au point que certains sont pris de nausées lorsqu’on évoque le concours. Cela n’a pas de sens de mettre sa propre santé en danger pour devenir professionnel de santé. » A l’issue des deux premiers semestres, alors qu’il pouvait poursuivre en redoublant sa première année, le jeune homme jette l’éponge.
Mais il faut rebondir, trouver une nouvelle voie. Celui qui se voyait soignant emprunte un grand virage. « Je choisis la comptabilité », explique-t-il. Le jeune homme y trouve des points communs avec l’odontologie et la médecine : une profession qui exige « beaucoup de contacts humains », et une profession libérale, indépendante. Celui qui était un brillant lycéen reprend des études comme sur des rails. Après cinq années d’école, il valide, en 2021, un master de comptabilité et gestion au sein de l’école Gaston-Berger, à Lille, puis il entame sa carrière dans un cabinet d’audit. « Mais, quelque part, dans ma tête, j’avais toujours cette envie d’être un acteur de la santé », confie-t-il.
Procédures « passerelles »
Il existe en France, pour les titulaires d’un master, d’un doctorat, d’un diplôme d’auxiliaire médical ou d’un titre d’ingénieur, des procédures dites « passerelles » pour rejoindre un cursus d’odontologie. Alors pourquoi ne pas revenir par la fenêtre quand la porte d’entrée est restée fermée ? Il envoie son dossier, la réponse des examinateurs est lapidaire : « Parcours professionnel non étayé. » « Encore une fois, le système français m’a bloqué », s’exaspère le jeune homme.
Mais sa vocation a des ressorts. En 2022, à 24 ans, Adil tente le concours de l’Université libre de Bruxelles, où 15 % des places peuvent être prises par des étudiants « non résidents ». Le Français est enfin reçu, en Belgique.
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