La voix de Frédéric Lebecq, 75 ans, emplit toute la modeste salle d’attente du cabinet de médecine générale de l’hôpital d’Avesnes-sur-Helpe (Nord). Au visage d’une autre patiente ou aux médecins qui passent une tête dans l’encadrement de la porte, il jacasse avec un entrain qui peine à dissimuler un quotidien « pas facile tous les jours ». Son fils, un autre Frédéric, âgé de 52 ans et lourdement handicapé, n’a plus de médecin traitant depuis deux ans. Le sien a déposé le bilan au même moment, selon lui « par peur du Covid-19 ».
Frédéric Lebecq (père) a besoin d’un traitement à renouveler tous les trois mois et Frédéric Lebecq (fils) ne peut se déplacer pour ses soins. Alors, après des mois de « débrouille », l’ouverture du cabinet de l’hôpital d’Avesnes, en mai 2022, leur a été salutaire. Réservées en priorité aux patients sans médecins référents, les consultations y sont assurées tous les après-midi de la semaine par une rotation de six médecins. Quatre libéraux retraités – Christian Castel, 73 ans, Xavier Pantou, 69 ans, Bénédicte Moreau, 67 ans, et Didier Fontaneau, 72 ans – sont à l’origine du projet, épaulés par le directeur de l’hôpital d’Avesnes, Serge Gunst, et par la communauté de communes du Cœur de l’Avesnois.
Ces généralistes avaient fermé leur cabinet depuis peu, « excédés, exténués, fatigués » par le libéral. Ils se sont pourtant portés volontaires pour participer à la campagne de vaccination contre le Covid-19 dès son ouverture – après « quinze jours de retraite », ironise Xavier Pantou. Leur « cabinet de premier recours » s’inspire de la même organisation.
Les médecins sont considérés comme vacataires, salariés de l’hôpital et effectuent une vacation par semaine. Ils ne s’occupent ni de la logistique ni de l’administratif : un « bonheur », reconnaît Christian Castel, par ailleurs élu au conseil municipal d’Avesnes et vice-président à la santé de la communauté de communes. Depuis son ouverture, il y a dix mois, le cabinet a honoré plus de 2 600 rendez-vous pour 2 049 patients et le président de la communauté de communes, Nicolas Dosen, ne cache pas sa « fierté de faire entrer des libéraux dans le public ».
Des médecins traitants officieux
Depuis que Bénédicte Moreau a pris sa retraite, en mars 2021, elle estime que moins de « la moitié de [sa] patientèle a retrouvé » un médecin référent. Sur les 43 communes qui composent le Cœur de l’Avesnois, 33 médecins généralistes sont installés pour 30 000 habitants. Soit 1,1 médecin généraliste pour 1 000 habitants, quand la moyenne nationale se situait à 1,48 en 2022.
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