« Quand on boit des coups, notre santé prend des coups. » Le slogan, qui accompagne le visuel d’un homme qui boit un verre, avec quelques lignes soulignant que « boire de l’alcool multiplie les risques de troubles du rythme cardiaque », circule désormais largement sur les réseaux sociaux. Il appartient pourtant à une campagne de prévention sur l’alcool qui n’a jamais pu voir le jour – elle a été retoquée par le ministère de la santé au printemps.
Deux campagnes ont été refusées, a révélé Radio France dans une enquête parue le 11 septembre : la seconde devait être diffusée ce mois-ci, durant la Coupe du monde de rugby. Il s’agissait d’un coach rappelant aux spectateurs d’éviter les abus de l’alcool, avec ce message : « Ne laissez pas l’alcool vous mettre KO ». Elle est restée dans les cartons.
Y aura-t-il un effet « Streisand », soit une diffusion décuplée à la suite de ces décisions ? C’est ce qu’espèrent les acteurs de la santé publique, écœurés par ce qu’ils voient comme une nouvelle manifestation de l’influence du « lobby alcoolier » sur le pouvoir actuel. Et du « blocage » face à toute véritable politique de santé publique en France sur l’alcool.
Outre ces deux campagnes de prévention écartées à l’époque de l’ancien ministre de la santé, François Braun, la rediffusion d’une ancienne campagne axée sur les repères de consommation à risque (« Pour votre santé, l’alcool, c’est maximum deux verres par jour. Et pas tous les jours »), a aussi été refusée cet été par le nouveau ministre, Aurélien Rousseau, selon Radio France, qui rend publique une partie de la lettre envoyée par le lobby Vin et Société au président de la République en janvier pour s’opposer avec vigueur à la dernière campagne de prévention sur l’alcool (« la bonne santé n’a rien à voir avec l’alcool »).
Des « briefs créatifs non retenus »
Au ministère de la santé, on se défend néanmoins d’avoir cédé à une quelconque pression. « Dans le contexte d’un nombre important de campagnes portées par l’Etat et ses opérateurs, dont Santé publique France, sur le deuxième semestre 2023, il a été décidé de revoir les priorités sur la thématique alcool et de prioriser la cible “jeunes” », explique-t-on avenue de Ségur, en précisant qu’une campagne en direction de la jeunesse est prévue pour la fin septembre. « Les jeunes de 17-25 ans sont plus exposés aux risques de consommations excessives », insiste-t-on, en rappelant qu’en 2022, 81 % des jeunes de 17 ans ont expérimenté l’alcool. Un renfort du site Alcool Info Service, pour améliorer l’orientation et l’aide personnalisée à destination des usagers, est également mis en avant parmi les actions du gouvernement sur l’alcool.
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