jeudi, octobre 10

Des propos qui ne passent pas auprès des députés Renaissance. Bruno Retailleau s’est exprimé ce jeudi matin dans les colonnes du Parisien et y annonce la fin de la circulaire Valls. La méthode contrarie le camp macroniste.

« Je m’étonne que la représentation nationale n’a pas été informée de votre initiative », tance le président de la commission des Lois Florent Boudié dans un courrier signé avec d’autres députés Renaissance membres de la commission qu’a pu se procurer BFMTV.

Pas un mot sur le sujet devant les députés

« Nous ne devons régulariser qu’au compte-gouttes sur la base de la réalité du travail et de vrais critères d’intégration », et « remplacer la circulaire Valls », a de son côté annoncé le ministre de l’Intérieur auprès de nos confrères.

La circulaire Valls, qui existe depuis 2012, pose des critères précis d’attribution de titres de séjour par les préfectures pour les personnes sans-papiers. Auparavant, elle reposait sur des critères discrétionnaires de la part des préfets.

Si ce positionnement de Bruno Retailleau, qui a fait de la lutte contre l’immigration irrégulière son cheval de bataille, n’est pas une surprise, la méthode déplaît au camp présidentiel. Auditionné la semaine dernière par les députés, Bruno Retailleau n’avait pas évoqué la remise en cause de la circulaire Valls.

Ce texte permet aux préfets de régulariser à titre exceptionnel des personnes pour des motifs de « vie privée et familiale » comme des enfants scolarisés ou une présence en France depuis plusieurs années. Les préfets peuvent également accorder un titre de séjour si le demandeur justifie notamment d’un certain nombre de fiches de paie.

Pas un « solde tout compte » sur la régularisation des étrangers

Cette circulaire régularise environ 30.000 personnes chaque année d’après un rapport de la Cour des comptes. Son application reste cependant à la libre appréciation des préfectures.

Alors que l’avenir de ce dispositif « ne figurait pas parmi les orientations présentées » par Michel Barnier lors de son discours de politique générale, comme le souligne le courrier, Florent Boudié juge que « le lieu de ce débat est à l’évidence le Parlement ».

Une façon pour le président de la commission des Lois de marquer son territoire alors que les circulaires ne nécessitent aucun vote des députés.

« Le sort que vous entendez » réserver à la circulaire Valls « ne peut être le solde de tout compte des actions à engager (…) sur la régularisation des étrangers en situation irrégulière », écrit encore Florent Boudié.

Autre réaction du camp macroniste: celle de Guillaume Gouffier. Le député de la 6e circonscription du Val-de-Marne a estimé qu' »abroger la circulaire Valls serait une erreur ».

« Une telle démarche n’améliorerait en rien la lutte contre l’immigration illégale », a-t-il encore développé sur X.

Le travail des sans-papiers, « facteur d’intégration »

En l’absence de majorité à l’Assemblée nationale, le ministre de l’Intérieur pourrait être tenté de ne pas passer par le Parlement sur les questions migratoires et multiplier plutôt les décrets en Conseil des ministres.

Bruno Retailleau a cependant déjà appelé ces dernières semaines à une nouvelle loi immigration qui reprendrait notamment des articles censurés par le Conseil constitutionnel en décembre dernier à l’issue de débats parlementaires chaotiques.

Le président de la commission des Lois appelle aussi le locataire de la place Beauvau à clarifier son positionnement sur la régularisation des travailleurs sans papiers dans les métiers dit ‘en tension’ prévue dans la loi immigration votée à l’hiver dernier.

« Les besoins économiques de notre pays et la forte demande rencontrée dans plusieurs secteurs d’activité plaident pour faire du travail un facteur d’intégration assumée », juge encore Florent Boudié.

« Fermer les yeux sur le travail clandestin »

Le ton est tout autre dans la bouche de Bruno Retailleau auprès du Parisien.

« Il y a aujourd’hui pratiquement un demi-million d’étrangers en situation régulière qui sont au chômage. Qu’est-ce qu’on fait? On continue de fermer les yeux sur le travail clandestin? », s’interroge le ministre de l’Intérieur.

Cette lettre arrive sur son bureau alors que ses relations avec la macronie sont très compliquées depuis son arrivée place Beauvau mi-septembre. Polémique sur l’État de droit, volonté d’en finir avec l’Aide médicale d’État, déclaration sur l’immigration « qui n’est pas une chance »… Les passes d’armes se sont multipliées ces dernières semaines entre le camp présidentiel et Bruno Retailleau.

Pour l’instant, Michel Barnier soutient son lieutenant. En déplacement dans la Vienne ce jeudi matin, le Premier ministre a assuré qu’il avait « confiance dans son ministre de l’Intérieur ».

Article original publié sur BFMTV.com

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