Quand on lui demande de se présenter, Pierre Le Coz répond très spontanément: « je suis le chanteur du groupe 22H22 et également commissaire divisionnaire de police, adjoint au chef de la BRI à Paris. » BRI pour brigade de recherche et d’intervention, une unité d’enquête et d’intervention de la police judiciaire française.
« Je ne suis pas le seul policier à avoir une vie artistique à côté », rappelle d’emblée le haut gradé, installé dans un fauteuil du mythique studio d’enregistrement parisien Ferber où le groupe a enregistré Les Grands Boulevards, son nouvel EP qui sortira en octobre prochain. « Je ne suis pas un policier blessé qui trouve son salut dans l’art », ajoute ce père de famille de 48 ans.
Policier chanteur
N’attendez pas de Pierre Le Coz qu’il vous raconte en chansons ses interventions. « J’écris des textes qui peuvent parler de la vie de mes concitoyens, mais aussi d’amour. J’écris aussi des chansons pour mes enfants, ma femme », détaille le policier. Si certains collègues publient des polars ou réalisent des films sur la profession, Pierre Le Coz assure que ses titres « dépassent purement l’aspect du policier qui se raconte dans une chanson ».
Il l’admet cependant lui-même: « si on ne me parlait que de la musique et de mes chansons sans évoquer ma carrière de policier, quelque chose en moi aurait envie de dire: ce n’est pas que ça. J’aurais peut-être besoin de le dire pour expliquer des chansons. »
Récemment, le groupe 22H22 a sorti un single, Que l’amour et la paix. « C’est le fruit de ce que j’ai ressenti, moi, comme évidence face à des gens qui n’avaient rien à perdre (…) Un terroriste, il ne va pas se dire: ‘je ne vais pas commettre un attentat, car je risque la prison’ alors que lui-même n’a pas peur de mourir. »
Grand fan du pionnier du rock français Jacques Higelin, qu’il tentait d’apercevoir en traînant plus jeune devant le studio d’enregistrement Ferber, Pierre Le Coz se nourrit parfois du terrain pour écrire ses titres. Sa chansonTout tremble et rien ne bouge raconte l’histoire d’une personne touchée par balle en pleine rue.
« Je l’ai écrite quand j’étais en poste à Grigny, je raconte l’histoire d’une personne qui prend une balle perdue, mais sans que l’on sache si c’est un policier, un habitant, un vendeur de drogue », explique Pierre Le Coz. « L’idée, c’est de dire que tout le monde se trouve sur un même pied d’égalité au moment où il va mourir. »
Dans le clip, le policier et son frère marchent près de terrasses de café où des personnes tombent à la renverse dans les bras d’autres. « Le clip a été tourné après les attentats du 13-Novembre. Je ne dis pas qu’il n’y a pas de lien. Il y a peut-être une allusion de manière inconsciente, mais elle n’est pas volontaire. »
Quitter un concert… pour une affaire de « stups »
Si Pierre Le Coz distingue sa vie de policier et de chanteur, ces deux sphères de sa vie ont pour lui un point commun: « C’est l’adrénaline ou le sentiment de vivre quelque chose d’extraordinaire ». Le père de famille revendiquer aimer vivre des choses « hors du commun ». « Et ça, je peux le vivre à la fois comme policier, mais aussi sur scène »
La scène, lui « offre un sentiment de liberté ». « C’est le seul moment de ma vie où je n’ai pas mon portable et qu’il est coupé », explique-t-il. « C’est une forme de liberté », confie le policier qui, le reste de la journée et de la nuit, peut être appelé à intervenir à tout moment dans le cadre de ses fonctions.
Quitter précipitamment la scène pour intercepter un go-fast, Pierre Le Coz l’a toutefois déjà fait. « Quand j’étais à la deuxième DPJ, on bossait sur des affaires de stupéfiants. Un soir, j’avais un concert important et en même temps un dossier de stups qui bougeait », raconte le policier encore amusé par l’anecdote.
Le show commence, Pierre Le Coz attrape son micro. Un enquêteur était malgré tout présent à l’attendre à moto, au cas où. « Il m’a fait un signe en me disant: ‘l’équipe arrive, il faut y aller’. Je n’ai pas fini le set, je suis parti sur la moto, on a rejoint le péage et on a interpellé le go-fast. »
Dans cette vie à deux cents à l’heure, Pierre Le Coz se pose pour écrire les chansons et les interpréter aux côtés des musiciens de 22H22, un groupe « né d’un coup de foudre humain ». Et si vous vous demandez quelle signification se cache derrière ce nom, Pierre Le Coz vous la livre bien volontiers: « mes parents disent qu’à 22h22 ils sont couchés, le 22, c’est le département de la famille, les Côtes-Armor. « On peut aussi dire ’22 v’là les flics' », conclut le policier-chanteur.
Article original publié sur BFMTV.com