- Ils sont à la tête de bâtiments exceptionnels, mais doivent aujourd’hui en assurer la survie.
- Face au coût d’entretien de bâtisses vieilles de plusieurs siècles, les châtelains doivent trouver des sources de revenus.
- De Chambord à des châteaux plus confidentiels, plusieurs initiatives ont vu le jour ces dernières années.
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Le 20H
La vie de châtelain, le temps d’une matinée. Dans le château de Canon, dans le Calvados, c’est une expérience un peu particulière qui est proposée aux curieux : une visite privée de ce domaine normand avec ses 15 hectares de parc et sa roseraie et des conseils de jardinage sur mesure. Depuis quelques années, les propriétaires ont en effet ouvert leur bâtisse et ses jardins aux curieux et propose des ateliers floraux.
« Ça nous fait une nouvelle activité économique, on a des ateliers créatifs, des enterrements de vie de jeune fille, de la vente de bouquets à nos visiteurs (…) Ça nous permet déjà de financer le poste de notre horticultrice »,
détaille Marguerite de Mézerac, directrice d’exploitation du château, dans le reportage en tête de cet article. Avec un nouveau concept mis en place récemment : un atelier floral personnalisé pour apprendre à faire son propre bouquet, le tout pour 55 euros. Un « revenu supplémentaire »
qui va permettre de financer la future rénovation des fenêtres du château, estimée à plus de 220.000 euros.
Payer l’entretien de ces bâtisses d’exception grâce à des activités dédiées aux visiteurs, c’est une nouvelle tendance parmi les châtelains français, devenus génies du marketing. Sur le domaine de Canon, Marguerite lance de nombreuses idées pour faire de son château un petit parc d’attractions : chasse au trésor, animation pour Pâques et Noël ou soirée illuminée en été. « Aujourd’hui, le tourisme représente près de la moitié de nos revenus »
, pointe la directrice d’exploitation. « Si on veut faire face à de futurs plus gros travaux, il faut qu’on arrive encore à se développer »,
détaille-t-elle encore. Objectif : attirer 10.000 visiteurs annuels supplémentaires et augmenter le chiffre d’affaires de 40% d’ici à trois ans.
Du vin « made in Chambord »
Ces nouvelles activités doivent permettre de faire face à la baisse des aides publiques et à des recettes billetterie insuffisante. Même les stars comme le château de Chambord, dans le Loir-et-Cher, s’y mettent. L’édifice connu dans le monde entier a lancé son propre vignoble et ses bouteilles de vin avec accessoires, bière, rillettes et miel, tous siglés du célèbre « Chambord », devenue marque à succès. Grâce à ces produits, les ventes réalisées dans les trois boutiques du domaine ont augmenté de 11,5% l’année dernière. Un record.
En Seine-et-Marne, près de Fontainebleau, les propriétaires du château de Bourron, sont les premiers habitants des lieux à faire de la bâtisse familiale un hôtel. Seize chambres y ont été aménagées pour un coût d’environ 150.000 euros de travaux par chambre. « Aujourd’hui, la location des chambres représente 60 à 70% du chiffre d’affaires »,
pointe Guy de Cordon, propriétaire et gestionnaire du château. Pour améliorer l’offre, la famille a aussi installé une maison d’hôte dans le parc, un terrain de tennis, une salle de fitness, un bain nordique et proposera bientôt un spa. Le charme de la Renaissance avec tout le confort du 21ᵉ siècle.
« Un château est toujours un gouffre, il aurait probablement été vendu »
sans ces offres, pointe Guy de Gordon. « En ayant trouvé une activité qui lui convenait, l’activité hôtelière, on a réussi à conserver ce patrimoine »,
se félicite-t-il.
À 400 km de là, près de Nantes, le château de Goulaine (Loire-Atlantique), a misé de son côté sur les banquets et les événements. Christophe de Goulaine, descendant des premiers châtelains du Moyen-Âge, coordonne désormais les séminaires d’entreprises ou les mariages accueillis sur la propriété. « Il faut beaucoup de réceptions, beaucoup d’événements à Goulaine pour boucler les fins de mois et les fins de siècle »,
assure-t-il. Mais le développement de l’événementiel permettra de financer les 300.000 euros de réfection de la toiture. Les prochains travaux de l’interminable liste des rénovations dont a besoin le château.