dimanche, octobre 27

Longtemps critiqué comme privilégiant les artistes au détriment du public, le ministère de la culture a inauguré en 2019, sous la présidence d’Emmanuel Macron, un véritable renversement de paradigme au terme duquel la politique de la demande devenait une priorité devant la politique de l’offre.

Du moins souhaitait-on un rééquilibrage, avec cela de magique que les achats effectués par les jeunes de 18 ans, grâce au Pass culture, seraient « en même temps » un outil de soutien à l’offre. Deux objectifs étaient visés pour le prix d’un, avec en plus le projet, tout en diversifiant les publics, de diversifier les pratiques effectives des jeunes !

A trop vouloir embrasser, on ne sait plus étreindre. On a donc révisé la copie : de 500 euros pour accéder à des sorties, pratiques ou biens culturels lors du lancement des expérimentations du passe, on est passé à 300 euros en 2021, car la somme était rarement dépensée. D’une durée d’un an, on est passé à deux afin de laisser au jeune le temps de faire ses choix.

Lire la chronique : Article réservé à nos abonnés « Plus le Pass culture a du succès auprès des jeunes, plus il creuse les inégalités qu’il est censé corriger »

D’une politique exclusivement centrée sur l’individu, on est passé à une logique hybride alliant l’octroi de la somme individuelle et d’une part collective gérée par les établissements scolaires (25 euros par élève pour les 4es et les 3es, 30 euros pour les 2des, 20 euros pour les 1res et les terminales, gérés dans le cadre de l’éducation artistique et culturelle). De 18 ans, on est aussi descendu dans les âges pour une part individuelle. D’une application centrée sur une logique marchande, on a tenté de faire aussi un outil d’éditorialisation et d’information, un « GPS de la culture ».

Mais l’application de ce dispositif souffrait de divers maux : difficulté à rassembler suffisamment de lieux intéressés par l’opération, pratiques de détournement (reventes) que l’on avait observées en Italie, où le gouvernement de Matteo Renzi avait lancé un « bonus cultura » dès 2016, propension à consommer des biens stars plutôt que de la diversité et faible effet de diversification des choix, car le temps passé sur le passe est très court, etc.

Usine à gaz

Pire encore, les fondamentaux étaient discutables : mépris des résultats de la recherche, alors que la sociologie a montré de longue date que le goût pour la culture s’acquiert au plus jeune âge, mépris des corps intermédiaires et des fonctionnaires (associations, médiateurs, bibliothécaires) dont on découvre bien tardivement le travail, sous-estimation du temps long nécessaire à l’évolution des pratiques effectives, mythe de l’argent réparateur, absence d’hésitation devant la mise en place de dispositifs excessivement complexes, confusion des objectifs (diversifier les pratiques culturelles des jeunes et en accroître l’intensité, démocratiser la culture) comme s’il s’agissait des deux faces d’une même pièce.

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