- Le Français Philippe Aghion s’est vu décerner ce lundi à Stockholm le prix Nobel d’économie.
- Cet économiste de renom, qui parle à l’oreille des présidents, promeut un capitalisme régulé.
Le Français Philippe Aghion s’est vu décerner ce lundi 13 octobre à Stockholm le prix Nobel d’économie. Cet économiste de renom devient à 69 ans le cinquième lauréat français à décrocher cette prestigieuse distinction. L’Académie royale des sciences de Suède vient récompenser ses travaux d’inspiration schumpetérienne – un modèle économique de croissance fondé sur la théorie de la croissance par l’innovation de Joseph Schumpeter -, développés avec l’économiste canadien Peter Howitt dans l’ouvrage Théorie de la croissance endogèn
e, paru en 1998. Il y promeut un « capitalisme régulé »
à la manière des modèles scandinaves, qui doit « penser aux plus vulnérables »
.
Philippe Aghion croit dans « le pouvoir de la destruction créatrice »
, qui est le titre de son dernier ouvrage (2020, avec Céline Atonin et Simon Bunel). Il y promeut l’idée de mieux réguler le capitalisme en favorisant l’innovation au détriment des rentes de situation. « L’idée, c’est de dire que la croissance, au long terme, c’est l’innovation. Et pas l’accumulation de capital, qui au bout d’un moment s’essouffle »
, expliquait l’économiste français lors d’un entretien avec l’AFP en 2019, citant l’effet drastique qu’a eu l’invention de la machine à vapeur sur la croissance à partir du XVIIIe siècle.
Il a conseillé Hollande et Macron
Philippe Aghion a contribué en 2012 au programme du futur président François Hollande et a également inspiré en 2017, avec Jean Pisani-Ferry et Philippe Martin, celui d’Emmanuel Macron. Ce qui ne l’empêche pas de faire entendre sa voix pour les critiquer lorsque les deux présidents n’ont pas appliqué totalement ses préconisations, comme quand il envoie en 2018 une note à l’Élysée pour alerter sur l’oubli du volet social de la promesse initiale. Sur X (nouvelle fenêtre), le président français l’a félicité, estimant que « par sa vision de la croissance par l’innovation, il éclaire l’avenir et prouve que la pensée française continue d’éclairer le monde »
.
Philippe Aghion est né en 1956 à Paris d’une mère juive émigrée d’Égypte, Gabrielle Aghion, fondatrice de la marque Chloé, qui a révolutionné la mode en inventant le prêt-à-porter de luxe au début des années 1950. Son père Raymond Aghion est connu pour avoir joué un rôle important dans l’avènement du mouvement surréaliste et communiste égyptien. De 1973 à 1984, il prend sa carte au Parti communiste français (PCF). Cet engagement estudiantin, Philippe Aghion ne le voit pas comme une contradiction avec ses positions actuelles.
« Je crois dans les mêmes valeurs (qu’à l’époque), mais je ne crois plus au grand soir. On ne peut pas dépasser le capitalisme, en revanche, on peut le réguler, le rendre à visage humain »
, estimait-il en 2019 auprès de l’AFP. Se définissant comme social-libéral, il réfute la qualification d' »économiste de gauche ». « Je pense que je suis un homme de gauche, mais je ne suis pas un économiste de gauche.
J’ai de profondes convictions de gauche. Mais comme économiste, je suis économiste, voilà tout »
, expliquait Philippe Aghion.
Après des études en mathématiques à l’École normale supérieure de Cachan jusqu’en 1980, il se lance dans l’économie à l’université Paris I, où il obtient son doctorat en 1983. Il part ensuite aux États-Unis pour étudier à Harvard, où il décroche un doctorat. Aujourd’hui, Philippe Aghion est professeur au Collège de France, où il est titulaire de la chaire « Économie des institutions, de l’innovation et de la croissance ». Il enseigne aussi à la London School of Economics. Il a en outre coprésidé un comité interministériel sur l’intelligence artificielle (IA), préconisant en 2024 des investissements massifs dans le secteur.




