mardi, novembre 19

On discutera longtemps des raisons du succès de Donald Trump. Comment une majorité d’Américains ont-ils pu voter pour le retour à la Maison Blanche d’un homme qui, quatre ans auparavant, a montré son total mépris pour les fondements mêmes de la démocratie ?

« It’s the economy stupid ! » : la réponse, régulièrement répétée depuis la campagne victorieuse de Bill Clinton contre George H. W. Bush [en 1992], semble confirmée par la multitude de sondages et d’enquêtes d’opinion publiés depuis des mois. Encore faut-il comprendre comment la hausse du prix des œufs a pu pousser nombre d’Américains à porter à la présidence un homme qui pourrait transformer demain les Etats-Unis en une vraie ploutocratie ?

Car, à bien y regarder, l’économie américaine est loin d’aller mal. La générosité du budget fédéral a permis à l’activité de reprendre avec force au sortir de la pandémie. L’inflation qui avait elle aussi bondi est en passe d’être maîtrisée. La Réserve fédérale n’a pas eu besoin pour y parvenir de provoquer une récession : depuis deux ans, la croissance reste solide et le chômage proche de ses plus bas.

Revenus désespérément bas

Mais le niveau des prix n’a pas baissé, celui des produits alimentaires en particulier. Il en va de même du prix des maisons, que les taux d’intérêt bas de la fin de la dernière décennie avaient poussé à la hausse. Quant aux loyers, ils ont explosé sous l’effet des changements de modes de vie liés à la pandémie, de l’afflux de migrants et des insuffisances de l’offre. Force est de le constater : sous la présidence de Joe Biden, les conditions de la vie quotidienne se sont durcies pour beaucoup d’Américains.

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Que l’on ait construit des usines dans les secteurs d’avenir à des rythmes encore jamais vus, que les salaires des emplois les moins bien rémunérés aient rarement progressé aussi vite, que le taux de chômage des Noirs n’ait jamais été aussi proche de celui des Blancs ne change rien à une réalité : les revenus d’une grande partie des ménages américains restent désespérément bas, alors que la richesse d’une petite minorité, portée par la hausse continue du cours des actions, n’a jamais été aussi élevée. Après plusieurs décennies d’un capitalisme largement laissé à lui-même, le ruissellement promis tient plus du goutte à goutte et la prospérité de l’économie est toujours plus mal partagée.

Ce creusement des inégalités a contribué à une érosion profonde de la cohésion sociale, érosion encore aggravée par la qualité, elle aussi toujours très inégale, de l’éducation et des soins de santé auxquels les Américains ont accès. Cette qualité est le reflet du prix, lui aussi très inégal, que la démocratie américaine accorde à la vie de ses citoyens.

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