jeudi, octobre 10

Le projet de loi de finances, présenté jeudi en conseil des ministres, détaille la façon dont le gouvernement envisage de faire 60 milliards d’euros d’économies.
La baisse des dépenses représentera 40 milliards d’euros d’efforts et les contributions fiscales exceptionnelles, 20 milliards.
Réductions des dépenses publiques dans toutes les administrations, taxe sur les billets d’avion et les jets privés, taxe sur l’électricité… Voici les principaux points à retenir.

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La France vit-elle au-dessus de ses moyens ?

Comment trouver 60 milliards d’euros et réduire le déficit du pays ? Le gouvernement a détaillé ses intentions ce jeudi, à l’occasion de la présentation en conseil des ministres de son projet de loi de finances pour 2025 qui sera débattu – et probablement combattu – dans quelques jours à l’Assemblée nationale. 

« Notre dette publique est colossale », a prévenu le ministre de l’Économie, Antoine Armand, lors d’une conférence de presse en amont du conseil des ministres, précisant qu’elle devrait s’établir en 2024 à 3300 milliards d’euros, soit 113% du PIB. « Cinquante budgets nationaux sont en déséquilibre et les dépenses publiques augmentent chaque année […] Ce budget est donc le premier d’une série pour passer en 2029 sous le seuil des 3% de déficit. »

« Si nous n’agissons pas maintenant, le déficit ne restera pas à 6% en 2025, car les dépenses publiques progressent mécaniquement […] Il atteindrait 7% du PIB si nous ne faisons rien », a renchéri le ministre du Budget Laurent Saint-Martin. « Nos comptes partiraient alors à la dérive. »

Comment trouver 60 milliards d’euros ? « Pour chaque euro de recette, il y aura deux euros d’économies budgétaires », a précisé le ministre. Le gouvernement vise d’abord la baisse des dépenses publiques, qui ont plongé les comptes de l’État dans le rouge. Puis souhaite instaurer des prélèvements « exceptionnels, temporaires et ciblés » pour réduire le déficit. Le projet de loi de finances sera examiné à l’Assemblée nationale à partir du 21 octobre.

Des « aides exceptionnelles » revues à la baisse

Pour baisser les dépenses de 40 milliards d’euros, tout le monde est concerné par le nouveau projet de loi de finances et par le projet de loi de la Sécurité sociale (PFLSS) : administrations publiques, État, Sécurité sociale et collectivités territoriales. Le gouvernement a acté au passage le report au 1ᵉʳ juillet de l’indexation des pensions de retraite sur l’inflation. 

Le projet de loi prévoit ainsi de supprimer certaines « aides exceptionnelles mises en place pendant les crises ». Voici lesquelles :

  • Le bouclier tarifaire sur l’électricité. Durant la crise de l’énergie, de 2020 à 2022, le gouvernement avait abaissé au minimum la taxe sur les tarifs réglementés de l’électricité (TIFCE). Celle-ci avait été relevée en début d’année, et le gouvernement prévoyait de la passer à 32 euros du MWh en février 2025. Il pourrait finalement aller bien plus loin, un montant autour de 50 euros du MWh ayant été avancé par Bercy jeudi. Il faudra toutefois attendre un arrêté en février 2025 pour connaître le montant précis. TF1info l’expliquait ici mardi : c’est en effet ce montant qui, combiné à la baisse des prix sur le marché de l’électricité, aboutira à tout de même faire baisser de 9% la facture de 85% des Français en février 2025. Cette baisse aurait cependant été bien plus élevée si la taxe avait été maintenue à 32 euros comme prévu initialement.
  • Les aides à l’emploi. Le projet de budget prévoit la suppression des emplois francs et la baisse du soutien sur les contrats aidés. Les aides à l’apprentissage vont également être « ajustées ».
  • La fin de la TVA réduite sur les chaudières à gaz. Il s’agit d’une « mise en conformité avec le droit européen qui n’autorise pas un taux réduit de TVA », justifie Bercy.

D’autres postes de dépense rabotés

Au chapitre des réductions de dépenses, certains ministères vont voir leur budget baisser. C’est le cas du ministère des Sports, pour lequel « les besoins réels baissent », avec la fin des Jeux olympiques. Les effectifs du ministère de l’Éducation nationale seront aussi impactés, avec la suppression prévue de 4800 équivalent temps plein, compensés en partie, plaide le gouvernement, par le recrutement de 2000 éducateurs (AESH) supplémentaires. Les effectifs de France travail seront également réduits. Plusieurs postes de dépenses sont par ailleurs visés : 

  • Fonds vert. Ce fonds vert pour les collectivités , censé leur permettre d’accélérer la transition énergétique et écologique de leurs territoires, va aussi être raboté : de 2,4 milliards d’euros en 2024, il passera à un milliard en 2025. 
  • MaPrimeRénov’. Les aides mises en place pour rénover son logement seront touchées. L’enveloppe pour MaPrimeRénov’ va baisser d’un milliard d’euros par rapport à 2024. 
  • Automobile. L’aide à l’achat de voiture va aussi être revue. Bercy évoque « une rationalisation » des dispositifs pour accompagner la transition vers les voitures électriques . Des mesures sur le malus automobile doivent en outre permettre de récupérer 300 millions d’euros. Sont notamment visés les véhicules de tourisme. 
  • Enfin, les crédits de l’aide publique au développement, en direction des pays les plus pauvres, seront également baissés. 

Hausses d’impôts ciblées

Le projet de loi de finances confirme les intentions du gouvernement de relever les impôts de façon ciblée, visant les grandes entreprises et les ménages les plus aisés. 

  • Impôt sur les entreprises. Toutes les entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse un milliard d’euros et sont bénéficiaires devront payer un complément exceptionnel : la recette attendue est de 8 milliards d’euros en 2025 et 4 milliards en 2026. Cela concerne 440 groupes, selon le ministère de l’Économie. Concrètement, les entreprises dont le chiffre d’affaires est compris entre 1 et 3 milliards d’euros connaitront un taux d’imposition sur les sociétés de 30% en 2025 et 28% en 2026. Celles dont le chiffre d’affaires est supérieur à 3 milliards d’euros auront un taux de 36% en 2025 et 30% en 2026.
  • Rachat d’actions. Ces derniers seront également taxés, mais seulement quand il s’agit d’annulations d’actions consécutives au rachat d’actions par une entreprise de ses propres titres (qui s’apparentent donc à des dividendes). L’État espère récupérer 200 millions d’euros par an avec cette mesure qui ne concerne que les sociétés dont le chiffre d’affaires est supérieur à un milliard d’euros.
  • Transport maritime. Une taxe exceptionnelle doit être mise en place pour les entreprises du secteur.
  • Impôt sur le revenu. Une contribution des foyers les plus riches est actée. Les ménages concernés, soit 65 000 foyers (0,3% des contribuables), sont ceux qui ont un revenu supérieur à 250.000 euros par an pour une personne seule et 500.000 euros pour un couple. Cette mesure prévoit une contribution additionnelle quand l’imposition du foyer est inférieure à 20% des revenus du foyer (pour atteindre ce seuil de 20%).
  • Secteur aérien. La taxe sur les billets d’avion va augmenter et les jets privés seront concernés : 1,5 milliard d’euros sont attendus. « Ceux qui voyagent beaucoup en avion doivent contribuer davantage aux investissements que nous devons faire pour la transition écologique et énergétique », a commenté Antoine Armand. Le montant de cette taxe n’a pas été dévoilé et ne figure pas dans le projet de loi de finances : il sera porté par amendement et a été réfléchi en concertation avec les acteurs du secteur, précise Bercy. L’idée est de gommer les différences avec nos voisins : la taxe sur les billets d’avion est de 2,6 euros en France contre une quinzaine d’euros au Royaume-Uni et en Allemagne.

Marianne ENAULT

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