lundi, juillet 8

Vladimir Poutine a campé sur ses positions vendredi en recevant au Kremlin le Premier ministre hongrois pour parler du conflit en Ukraine, voyant en Viktor Orban le représentant de l’UE, malgré les dénégations de Bruxelles.

« La Russie veut l’arrêt total et définitif du conflit, la condition pour cela est (…) le retrait total de tous les soldats ukrainiens des républiques populaires de Donetsk et de Lougansk et des régions de Zaporijjia et de Kherson », a dit le président russe devant la presse à l’issue de sa rencontre, réitérant ses exigences déjà balayées mi-juin par Kiev et les Occidentaux.

« Il reste de nombreuses étapes à franchir » pour « mettre fin à la guerre » et « instaurer la paix », a pour sa part reconnu le dirigeant hongrois, aux côtés de Vladimir Poutine.

« Il y a de moins en moins de personnes qui peuvent parler à tous les belligérants et la Hongrie » est en mesure de le faire, a-t-il assuré.

Victor Orban s’était rendu mardi dans la capitale ukrainienne, où le président Volodymyr Zelensky avait aussi réitéré ses exigences de retrait complet des Russes du territoire ukrainien et du paiement de réparations.

Le chef de l’Etat russe a quant à lui profité de la visite de son unique allié dans l’Union européenne pour mettre Bruxelles dans l’embarras, le tout à quelques jours d’un sommet de l’Otan à Washington où il sera question de l’Ukraine.

Au début de cette rencontre, il a souligné que le Premier ministre hongrois était arrivé à Moscou « non seulement en tant que partenaire de longue date mais aussi en tant que président du Conseil » de l’Union.

L’ambiguïté de la double casquette de M. Orban, chef du gouvernement hongrois et président du Conseil de l’UE, a hérissé les partenaires européens de Budapest, qui s’affichent comme des soutiens sans faille de l’Ukraine et ont coupé les ponts avec la Russie.

– Condamnation de Kiev –

Pour le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell, M. Orban « ne représente donc pas l’UE, en aucune manière », alors que le porte-parole du Kremlin, Dimitri Peskov a ironisé en disant qu’il n’appartenait pas à Moscou de comprendre la « subtilité des pouvoirs » à Bruxelles.

Charles Michel, le président du Conseil européen, qui rassemble les dirigeants des Vingt-Sept, avait réagi dès jeudi soir à l’annonce officieuse de ce déplacement.

« La présidence tournante de l’UE n’a pas de mandat pour engager le dialogue avec la Russie au nom de l’UE », a écrit M. Michel sur X, soulignant que, pour les 27, « la Russie est l’agresseur, l’Ukraine est la victime » et qu' »aucune discussion ne peut avoir lieu sans l’Ukraine. »

La solidarité de l’UE envers Kiev ne faiblira pas, a de son côté assuré le chancelier allemand Olaf Scholz.

Alors que cette visite risque de brouiller les positions dans la perspective du prochain sommet de l’Alliance atlantique, le secrétaire général de cette organisation Jens Soltenberg a insisté sur le fait que « Viktor Orban ne représente pas l’Otan à ces rencontres, il représente son propre pays », admettant toutefois que l’Alliance avait été « informée » de ce déplacement.

Kiev, qui entretient des relations compliquées avec Budapest du fait notamment de ses prises de position prorusses, a fustigé ce déplacement à Moscou qui a été décidé « sans aucun accord ou coordination avec l’Ukraine ».

« Nous rappelons que, pour notre pays, le principe +pas d’accord sur l’Ukraine sans l’Ukraine+ reste inviolable », a martelé la diplomatie ukrainienne.

– Demande russe de capitulation –

Les conditions pour arrêter le conflit posées par la Russie sont que l’Ukraine lui cède les quatre régions dont elle revendique l’annexion, en plus de la Crimée, et qu’elle renonce à son alliance avec les Occidentaux. De facto, une demande de capitulation.

A Kiev, M. Orban avait jugé, quant à lui, que l’Ukraine devait accepter un cessez-le-feu, un préalable rejeté par les Occidentaux et les Ukrainiens.

L’Ukraine réclame une « paix juste » qui passe par le retrait des troupes russes et le respect de son intégrité territoriale.

La présidence tournante au sein de l’UE, qu’assure la Hongrie jusqu’à la fin de l’année, permet au pays qui la détient de contrôler l’ordre du jour des réunions des 27, à l’exception de celles des ministres des Affaires étrangères, un pouvoir non négligeable mais pas absolu, selon plusieurs diplomates européens.

Budapest avait promis d’assurer une présidence « normale », malgré les nombreux différends, notamment sur la Russie, qui l’opposent à ses partenaires.

« Nous agirons en tant que médiateur impartial », avait affirmé le ministre des Affaires européennes Janos Boka, avant d’ajouter que la Hongrie en profitera pour mettre en avant sa « vision de l’Europe » et « redresser la barre (…) dans la bonne direction ».

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