Sa « petite phrase » lui vaut un signalement à la justice. Brigitte Macron est au cœur d’une polémique depuis la publication lundi 8 décembre par l’hebdomadaire Public d’une vidéo dans laquelle elle qualifie de « sales connes » quatre militantes du collectif féministe #NousToutes. Dès le lendemain, l’association montpelliéraine Les Tricoteuses hystériques a annoncé sa décision de déposer une plainte pour injure.
#salesconnes devient le slogan de ces féministes après les propos de Brigitte Macron
« Elle est en cours de rédaction, elle part à la fin de la semaine avec les noms de toutes les coplaignantes », a assuré sa présidente Vigdis Morisse Herrera au HuffPost. Ce mercredi, elle appelle « toutes les associations qui se sont senties attaquées » à participer. Comme beaucoup de militantes féministes, elle a été ulcérée par les mots employés par Brigitte Macron à l’encontre des activistes qui ont interrompu le spectacle d’Ary Abittan samedi soir à Paris.
« Les Premières dames portent une parole publique qui les oblige »
Pour commencer, cette phrase a de quoi étonner dans la bouche de la femme du président. « Les Premières dames portent une parole publique qui les oblige, parce qu’elles incarnent une position symbolique forte », analyse Fiona Texeire, cofondatrice de l’Observatoire des violences sexistes et sexuelles (VSS) en politique. Au-delà des « insultes grossières », cette spécialiste de la communication politique dénonce auprès du HuffPost le choix de Brigitte Macron, mais aussi de l’ancien Premier ministre Manuel Valls (lui aussi photographié dans les coulisses des Folies Bergères), d’avoir apporté « leur soutien » à Ary Abittan « par leur simple présence » en coulisses.
Une analyse partagée par Vigdis Morisse Herrera, qui souligne que « sur les dizaines de spectacles programmés à Paris ce soir-là », la Première dame « a choisi d’aller voir celui d’Ary Abittan ». « Elle est allée dans les coulisses pour le soutenir face aux méchantes féministes, c’est son choix et il faut l’assumer », fustige la militante qui relève que c’est le « statut » de Brigitte Macron qui lui a permis de rencontrer l’humoriste.
Le fait que le statut en question n’ait rien d’officiel n’en fait pas moins une actrice importante de la vie publique, affirme Vigdis Morisse Herrera, qui considère que la Première dame a un « devoir d’exemplarité ». « Elle a des avantages et l’État fait des dépenses pour elle, tout ceci l’oblige », insiste-t-elle avant de trancher : « Tenir ce genre de propos quand on est dans sa position, c’est inaudible ».
Une « diabolisation des mouvements féministes »
Pour les deux interloctrices du HuffPost, les propos de Brigitte Macron – et ceux de son mari avant elle – interrogent aussi en raison du message qu’il font passer aux victimes de violences sexuelles. « Le couple Macron ne semble pas préoccupé par l’image dramatique qu’il renvoie en matière de lutte contre les VSS », considère Fiona Texeire, évoquant les « hommes mis en cause pour viol » que le président a « publiquement soutenus », notamment Gérard Depardieu et le ministre Gérald Darmanin – qui a depuis bénéficié d’un non-lieu.
Interrogée sur la défense de Brigitte Macron, dont l’entourage assure qu’elle désapprouve seulement la « méthode radicale » de #NousToutes, Fiona Texeire dénonce la « diabolisation des mouvements féministes » et défend leur « liberté d’expression ». La cofondatrice de l’Observatoire des VSS en politique assume son désaccord avec l’argument, répété mardi par l’avocate d’Ary Abittan, consistant à dire que le non-lieu signifie que l’humoriste est « innocent » aux yeux de la justice.
« La justice dit qu’elle n’est pas en mesure de se prononcer » et « l’affaire n’a pas été jugée », développe-t-elle avant de déclarer : « dans un pays où moins de 1 % des affaires de viol aboutissent à une condamnation, se cacher derrière l’absence de condamnation c’est lâche et hypocrite ». Même son de cloche du côté de Vigdis Morisse Herrera, pour qui « à partir du moment où 96 % des plaintes pour viol sont classées sans suite », on n’a pas « de raisons de fanfaronner ».
Un « double discours » qui « décourage les victimes »
La présidente de Tricoteuses hystériques souligne elle aussi les effets que les propos de Brigitte Macron peuvent avoir sur les victimes. « Est-ce que ce genre de propos à la tête de l’État sont un encouragement à aller demander justice ? », demande-t-elle, expliquant que son objectif en portant plainte est que « les femmes victimes se disent qu’on ne laisse plus rien passer ».
Même préoccupation chez Fiona Texeire, qui met en parallèle les propos de la Première dame avec la politique de son mari. « Au-delà de ces mots, les actes du gouvernement envoient un message délétère aux victimes », estime-t-elle, jugeant que le projet de budget pour 2026 n’est pas à la hauteur des besoins pour prévenir les violences faites aux femmes et en contradiction avec la promesse d’Emmanuel Macron en 2017 et en 2022 de faire de la lutte contre les VSS la « grande cause » de son quinquennat.
« Tenir un double discours, en disant soutenir la parole des femmes tout en insultant les militantes et en réduisant les budgets, relève de la dissonance la plus totale », dénonce Fiona Texeire, alertant sur le fait que cette mécanique risque de « contribuer à décourager les victimes ».
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