Une visite « historique ». Le Vatican a officialisé ce samedi 23 novembre la venue du pape François en Corse, à Ajaccio, le 15 décembre prochain. Cette visite, très attendue sur l’île méditerranéenne française à forte tradition catholique, survient une semaine après la réouverture de Notre-Dame de Paris.
Une réouverture à laquelle il n’assistera pas, le pape ayant décliné l’invitation lancée par la France l’an dernier. De quoi susciter de l’étonnement chez certains. Pour expliquer ce choix, plusieurs évêques français ont mis en avant l’attachement de François aux « périphéries » et ses contraintes de calendrier à Rome.
« La vedette de la réouverture de Notre-Dame de Paris, c’est Notre-Dame de Paris » et François ne souhaitait pas « détourner le regard vers lui à cette occasion », a ainsi déclaré le président de la conférence des évêques de France, Mgr Eric de Moulins-Beaufort, à l’AFP.
« Proximité géographique et culturelle »
Le pape a été invité en Corse par Mgr François-Xavier Bustillo, 56 ans, très populaire et médiatique évêque d’Ajaccio depuis 2021, qu’il avait créé cardinal en septembre 2023.
« Je vous assure que je n’ai pas lancé une opération séduction », a plaisanté Mgr François-Xavier Bustillo au micro de BFMTV. « J’ai juste pu échanger avec lui sur ce que je vis dans mon diocèse, mes rencontres avec les Corses, dans tous les domaines, politique, économique, associatif, culturel. »
« Je lui ai aussi dit que nous vivions une spiritualité forte (…) notre tradition est très ancrée dans la foi chrétienne, et le pape a aimé ce côté », a-t-il assuré.
Avant d’ajouter: « Je pense qu’il a tenu compte de la proximité géographique et culturelle ».
Un intérêt pour la « périphérie des frontières »
Pour Alexandre Farina, premier adjoint au maire (Horizon) d’Ajaccio, « le pape a montré depuis le début de sa pontification », l’intérêt qu’il porte à la « périphérie des frontières ».
« Il a considéré que la Corse était un lieu intéressant à la marge de la métropole », a-t-il assuré tout en pointant du doigt l’intérêt du Souverain pontife pour le colloque sur la « piété populaire » qu’il va conclure.
Si Alexandre Farina consent que la réouverture de Notre-Dame est « aussi un moment historique », il se félicite de ce « moment extraordinaire, unique pour la Corse » pour lequel la mairie est « sur le pont depuis des mois ».
Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif de Corse, estime de son côté sur BFMTV que les « joies ne se concurrencent pas » et souligne les « liens anciens, historiques entre le peuple corse et le Vatican », sources de motivation. Le Saint-Siège et « l’île de beauté » partagent par exemple l’image de l’implantation du monachisme (état de vie monastique) sous Grégoire Ier au VIe siècle ou la création de la garde corse papale au XVIIe siècle.
« Un homme très libre »
La « liberté » du pape est également rappelée par Mgr François-Xavier Bustillo qui ne voit dans cette décision « ni politique, ni polémique ».
« Je crois qu’il n’y a aucune manipulation, le pape est libre », a-t-il déclaré.
Pour le cardinal franco-espagnol, le pape François « ne fonctionne pas à l’affectif, il doit évaluer tous les éléments. C’est un homme très libre, et il a choisi en fonction de ce qu’il croit juste et bon ». Sans que cela n’ait de lien avec la personnalité ou la politique d’Emmanuel Macron selon lui. Les deux hommes s’entretiendront d’ailleurs ce 15 décembre sur « l’île de beauté » en fin de journée à l’aéroport d’Ajaccio, avant le retour à Rome du souverain pontife.
« Le pape aime bien Macron, il est jeune », confirme sur notre plateau, Caroline Pigozzi, vaticaniste et collaboratrice à La Tribune dimanche. Cette dernière rappelle de plus qu’à la date de la réouverture de Notre-Dame, le 8 décembre, le pape n’est traditionnellement pas disponible.
« Tous les ans », le 8 décembre, le pape fête l’Immaculée Conception à Rome avec une « grande cérémonie », souligne-t-elle.
Cette visite éclair en Corse est aussi présentée comme moins « fatigante » qu’une venue à Paris pour le jésuite argentin qui va fêter ses 88 ans et qui présente des problèmes de santé.
« Il faut qu’il respire un peu, il ne peut pas courir comme un jeune cardinal », abonde la vaticaniste, auteure de Pourquoi eux?.
Le pape François arrivera à Ajaccio à 9 heures et repartira peu après 18 heures, selon le Saint-Siège. Il prononcera deux discours et présidera une messe dans l’après-midi au théâtre de verdure du Casone, avant de s’entretenir avec le président Emmanuel Macron.
Le chef de l’Église catholique s’est déjà rendu deux fois sur le territoire français depuis le début de son pontificat en 2013, à Strasbourg en 2014 et à Marseille en septembre 2023, mais n’y a jamais effectué de visite d’Etat. Ce déplacement en Corse sera son 47e voyage international depuis son élection en 2013 et le troisième de 2024.
Article original publié sur BFMTV.com