vendredi, juin 28

A la fin du mois de juillet, la France va connaître un net recul sur le plan de la transparence financière, avec la fermeture au public de son registre des bénéficiaires effectifs des sociétés (RBE). L’information a été confirmée au Monde par la direction générale du trésor (DGT), qui dépend du ministère des finances.

Ce registre ouvert en avril 2021 permettait à tout citoyen de connaître facilement l’identité des propriétaires des entreprises françaises – par l’intermédiaire de la plate-forme officielle Data.inpi.fr, ou de l’un des nombreux rediffuseurs spécialisés dans l’information légale, comme Pappers, Doctrine ou Societe.ninja. Réclamé de longue date par les organisations de la société civile, le RBE était considéré comme une avancée majeure en matière de transparence financière et de lutte contre la fraude et le blanchiment. Faute d’information sur les bénéficiaires effectifs, les personnalités criminelles ou sous sanctions peuvent en effet se dissimuler facilement – et légalement – derrière des prête-noms ou des sociétés-écrans agissant comme gérants ou actionnaires.

Certains bénéficiaires de sociétés reprochaient au registre public de porter une atteinte excessive à leur vie privée, en révélant leur date de naissance et la liste de leurs actifs. Mais depuis trois ans, il s’était surtout imposé comme un réflexe pour de nombreux acteurs économiques. « Le bénéficiaire est une donnée-clé pour identifier qui est derrière une entreprise, extrêmement utile et consultée par nos utilisateurs », témoigne Pierre Fruchard, le créateur de Pappers. « Dans un monde de plus en plus complexe, il est important de savoir à qui l’on a affaire, abonde Hugo Ruggieri, le directeur juridique et des affaires publiques de Doctrine. Si, par exemple, un boulanger veut vérifier que son blé ne vient pas d’intérêts russes, cela sera désormais malheureusement très complexe. »

Une décision inéluctable

Le RBE est aussi très utilisé par les médias qui enquêtent sur la corruption et la criminalité financière. En juillet 2022, l’hebdomadaire L’Obs y avait eu recours pour révéler qu’une soixantaine de personnalités impliquées dans des affaires de corruption ou visées par des sanctions internationales avaient investi massivement dans l’immobilier français. Le même registre avait permis au média d’investigation Disclose de questionner les liens d’Agnès Pannier-Runacher, alors ministre de la transition énergétique, avec la société pétrolière Perenco – la forçant à prendre un décret pour se déporter des décisions sur cette entreprise. Le Monde l’utilise régulièrement pour démasquer les conflits d’intérêts des politiques, suivre la piste de mouvements ésotériques sectaires ou de possibles « biens mal acquis ».

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