Le « wrapped 2025 » de l’Élysée aura une saveur particulière ce 31 décembre 2025. Emmanuel Macron va, comme c’est l’usage, prendre la parole en ce début de soirée de Saint-Sylvestre en léger différé pendant une dizaine de minutes, pour formuler ses vœux aux Français. Mais pour dire quoi au juste ? Auprès du HuffPost et de la presse, l’entourage du président a promis en amont : ni « rétrospective », ni « immobilisme ».
Selon son équipe, « le président aura à cœur de montrer que 2026 sera une année d’action et utile au pays. Des choses vont se nouer en 2026 et elles compteront dans cinq, dix ans et plus ». Pour Philippe Moreau Chevrolet, spécialiste de la communication politique, joint par Le HuffPost, Emmanuel Macron n’a de toute façon pas d’autre choix que de se projeter dans l’action « pour être lui-même utile ». Et pour être « au centre de l’attention » afin de ne laisser aucun espace libre à celles et ceux qui entendent lui succéder.
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L’an passé, outre le fait qu’il faisait son mea culpa sur la dissolution, Emmanuel Macron imaginait une année « de stabilité », au cours de laquelle les Français seraient appelés à « trancher » sur certains sujets. Il souhaitait aussi pour 2025 une meilleure protection de l’agriculture française, 2024 ayant été marquée par des manifestations musclées.
Douze mois plus tard, pas l’ombre d’une prophétie autoréalisatrice. Les Français n’ont jamais été appelés aux urnes pour un référendum, et la France a vécu à l’automne dernier, après la chute de François Bayrou, une des pires crises politiques de la Ve République, avec la nomination (puis le crash) du gouvernement le plus éphémère du régime. Quant à la colère agricole, elle a rappelé en cette fin d’année qu’elle ne s’était jamais vraiment éteinte.
Le réveil européen de la Défense
Si 2026 va donc débuter avec un léger air de déjà-vu sur certains sujets, le président veut comme l’année dernière avec les JO de Paris, célébrer les divers succès tricolores déjà évoqués dans sa vidéo publiée mardi, en insistant notamment sur le prix Nobel d’économie remis à Philippe Aghion, ou encore les signaux économiques – modestement – encourageants de l’Insee pour début 2026. Lesquels montreraient que la France « résiste bien » en ces périodes troubles. L’occasion de glisser un tacle politique « aux patriotes autoproclamés » qui pratiquent un peu trop le « french bashing » au goût de l’Élysée.
Véritable domaine réservé, les questions internationales seront « la toile de fond » de l’allocution. Ce qui permettra au chef de l’État de célébrer son propre succès en 2025 : le réveil européen sur le renforcement de la défense face à l’ambiguïté américaine et les menaces de Moscou. Un sursaut qui s’est traduit par le lancement du programme ReArm UE et la création en France d’un nouveau service militaire national volontaire. Une autre victoire qui participera au bilan macroniste, dans les années à venir, veut-on croire du côté de l’Élysée.
Pas question en revanche de profiter de ce rendez-vous pour adresser un message direct à Donald Trump. « Dans ce climat international très inquiétant, les Français ont besoin d’être rassurés. Il faut donner de vraies informations face à des campagnes de désinformation massives. Sur ce sujet il est quasiment le seul à pouvoir le faire avec autant de statures », estime à cet égard Philippe Moreau-Chevrolet qui prédit par ailleurs que certainement « pour la première fois », ces vœux seront scrutés de près par Moscou, Washington et d’autres grandes capitales qui n’hésiteront pas à réagir.
Un dernier pari présidentiel ?
C’est la dernière fois qu’Emmanuel Macron aura le loisir de formuler des propositions nationales crédibles, avec un peu de temps pour espérer les mener à bien, et dans un contexte où surtout « il est amené à disparaître », estime le spécialiste. De fait, confiné politiquement et éclipsé par un Premier ministre dont la longévité tient à l’art de la négociation, le président semble condamné à éviter les promesses d’envergure pour se concentrer sur le consensuel.
C’est le cas de la protection des mineurs face aux réseaux sociaux et à la désinformation, avec des annonces prévues en janvier. De quoi illustrer comme le rappelle Philippe Moreau-Chevrolet l’influence qu’a encore Emmanuel Macron sur l’agenda médiatique, même si les actions en question seront certainement « plus symboliques que réelles » faute de majorité et alors que les partis issus de son camp veulent surtout prendre leurs distances avec son héritage.
Pas question donc de s’épancher sur les questions et les politiques budgétaires alors que le projet de loi de finances est, comme l’année dernière, voué à des négociations prolongées. Voilà Emmanuel Macron condamné à de nouveau appeler à la responsabilité et au compromis. Selon l’entourage du chef de l’État, qui s’exprimait avant que le texte définitif soit arrêté, le sujet de la fin de vie pourrait faire irruption dans la déclaration. Le projet de loi doit encore être examiné au Sénat et le président avait promis un référendum si le dossier s’embourbait au Parlement.
Entend-il s’appuyer sur cette question pour consolider un bilan qui a fondu ces derniers mois ? Ses propres troupes ont dû se résoudre à la suspension de la réforme des retraites, une des rares mesures de poids de son second quinquennat. En attendant, louvoie-t-on au Palais, il garde dans sa manche l’outil du référendum.
L’Élysée a beau assurer que ces neuvièmes vœux seront proactifs, ils sonneront pourtant bien comme les premières notes du générique de fin… et le préambule d’une nouvelle séquence politique qui devrait durer 15 mois. Elle s’ouvrira avec les municipales de mars prochain, avant d’amener les Français à choisir en mai 2027, celui ou celle qui lui succédera. Ce n’est pas encore un adieu. Mais sur le fond comme sur la forme, ça pourrait y ressembler.
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