Donald Pols, directeur du mouvement Milieudefensie, tentait de se consoler après la décision de la cour d’appel de La Haye qui, lundi 12 novembre, venait de casser le jugement qualifié d’« historique » qu’avait prononcé un tribunal de district de la même ville en 2021 : le groupe pétrolier et gazier Shell ne sera finalement pas contraint de réduire ses émissions de dioxyde de carbone (CO2) de 45 % en 2030 – par rapport à leur niveau de 2019. « Cela fait mal, mais cette affaire aura au moins démontré que les grands pollueurs ne sont pas intouchables et que le débat sur leur responsabilité dans le combat contre le réchauffement a été stimulé », a déclaré M. Pols, sans cacher son amertume.
La défaite pour son organisation et les six autres qui avaient lancé la procédure contre Shell, ainsi que pour les 17 000 citoyens qui s’étaient joints à leur plainte, est cinglante. Eux estimaient que, faute de mesures imposées aux pétroliers, il sera impossible d’atteindre les objectifs de l’accord de Paris, et la juge néerlandaise Larisa Alwin leur avait donné raison en première instance. Elle avait statué que la compagnie anglo-néerlandaise et ses 1 100 filiales mondiales contribuaient « aux conséquences désastreuses du changement climatique » et avait décidé dès lors que Shell devrait revoir son objectif de 20 % de réduction de ses émissions en 2030, pour le porter à 45 %. Un objectif que la compagnie disait vouloir atteindre en 2035, au mieux.
La décision de Mme Alwin avait suscité l’euphorie dans le camp des défenseurs de l’environnement, certains que son jugement, qualifié par eux d’« avancée gigantesque », aurait des conséquences majeures au niveau mondial. D’autant qu’aux Etats-Unis, le patron d’ExxonMobil affrontait à l’époque la fronde de certains de ses actionnaires, mécontents qu’il reporte les décisions pour favoriser une transition verte.
« Une exigence de gestion consciencieuse »
Shell entendait toutefois poursuivre son combat judiciaire, en plaidant notamment que seules les autorités politiques pouvaient lui imposer des objectifs environnementaux. Lundi, Wael Sawan, le directeur général de la compagnie, s’est dit dès lors « heureux » de la décision de la cour d’appel. Elle est, selon lui, « bonne pour la transition au niveau mondial et pour les Pays-Bas ». Le groupe avait affirmé que son existence même serait remise en question s’il se voyait imposer des contraintes supplémentaires. Et, devant la cour d’appel, ses avocats ont insisté sur le fait qu’il était « provisoirement » impossible que le monde se passe des énergies fossiles. L’entreprise affirme, en revanche, qu’elle maintient son objectif d’être neutre en matière d’émissions à l’horizon 2050.
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