jeudi, novembre 7

L’Amavea, une association de victimes de l’Androcur, un médicament à l’origine de tumeurs, a déposé une plainte pénale contre X mardi à Paris.
Cette dernière vise notamment les infractions de mise en danger d’autrui, non-signalement d’effet indésirable et tromperie aggravée.
La présidente de l’Amavea espère ainsi savoir « où il y a eu des fautes de la part des différents acteurs » chargés de la sécurité du médicament.

L’Amavea, une association de victimes de l’Androcur, un médicament à l’origine de tumeurs, a déposé une plainte pénale à Paris contre X pour dénoncer la « faillite » des acteurs en charge de la sécurité de ce médicament, ont indiqué jeudi l’avocat et la présidente de l’association. « Il est aujourd’hui évident que les acteurs en charge de la sécurité d’Androcur – Agence de santé, laboratoires, médecins – ont failli dans la gestion des effets secondaires de ce médicament », ont écrit Me Charles Joseph-Oudin et Emmanuelle Mignaton, présidente de l’Amavea, dans un communiqué sur cette plainte dévoilée par Le Monde jeudi matin. « L’Amavea, représentante de milliers de victimes, souhaite qu’une enquête soit menée pour déterminer les négligences commises et établir la responsabilité des acteurs impliqués », ont-ils poursuivi, demandant la désignation d’un juge d’instruction.

La plainte pénale, déposée mardi et dont l’AFP a eu connaissance, vise les infractions d’administration de substance nuisible, atteinte involontaire à l’intégrité de la personne, mise en danger d’autrui, non-signalement d’effet indésirable et tromperie aggravée.

« Responsabilités partagées »

« Contrairement aux procédures lancées jusque-là qui visaient à demander une indemnisation des victimes, notamment en mars dernier auprès du tribunal administratif, il s’agit cette fois de savoir qui sont les responsables dans cette histoire, est-ce qu’il y a des personnes qui ont fait leur travail de façon correcte et où précisément est-ce qu’il y a eu des fautes de la part des différents acteurs », insiste auprès de TF1info, la présidente Emmanuelle Mignaton. « C’est bien pour ça que c’est une plainte contre X, tous les acteurs en charge de la sécurité du médicament sont visés », ajoute-t-elle, précisant n’avoir « aucun a priori » et attendre simplement « des réponses et des réactions », notamment de la part du laboratoire Bayer qui commercialise l’Androcur, accusé de retard dans la mise en place de mesures d’information et de prévention.

« En tant que victimes, on a besoin de comprendre ‘pourquoi’ la situation en est arrivée là, et le silence on n’aime pas beaucoup, surtout quand on est nombreuses concernées », poursuit-elle.

« Les procédures individuelles civiles engagées pour demander indemnisation ont l’air de démontrer que les responsabilités sont partagées entre les différents acteurs, donc ce qu’on veut savoir désormais c’est ce qui n’a pas fonctionné pour que les patientes soient informées plus vite et ce qu’on peut changer dans le circuit du médicament pour qu’un tel désastre ne se reproduise pas », insiste-t-elle.

Pourquoi maintenant ? Pour Emmanuelle Mignaton, la « faillite semble évidente » à la lumière des procédures individuelles lancées précédemment pour obtenir une indemnisation. « On avait besoin avec le cabinet d’avocats de toutes ces procédures individuelles qui ont démarré dès 2018 pour savoir si une indemnisation était possible ou pas, grâce aux rapports d’expertise, on voit bien qu’il y a des choses qui ont dysfonctionné ».

Des cas de méningiomes déclarés aux labos « dès 1998 »

D’après la plainte, « à compter de 1998, des cas de méningiomes sont régulièrement déclarés aux laboratoires commercialisant l’Androcur ». Théoriquement indiqué contre une pilosité excessive, mais prescrit pendant des décennies par de nombreux médecins bien au-delà de ces indications, notamment contre l’endométriose, le lien du médicament Androcur (acétate de cyprotérone) avec les méningiomes a été clairement établi en 2018. Les méningiomes sont des tumeurs des membranes qui entourent le cerveau. Ces tumeurs sont parfois qualifiées de « bénignes », car elles ne sont pas susceptibles de dégénérer en cancers mortels, mais elles peuvent provoquer de graves handicaps neurologiques.

Pour Me Joseph-Oudin et Mme Mignaton, « ce surrisque, identifié par le laboratoire dès 2004, a ensuite été reconnu par la firme et l’ANSM (agence de sécurité du médicament, NDLR) en 2008/2009. Pourtant, aucune information n’a été communiquée aux professionnels de santé prescripteurs ni aux patientes avant 2019 ». Cette année-là seulement, « l’Autorité de santé et le Laboratoire mettent en place un plan de gestion des risques qui incluait, entre autres, la diffusion d’une information ciblée auprès des patientes sous Androcur », ont-ils critiqué. Sollicité par TF1info, ce dernier n’a pour l’heure pas donné suite. Les prescriptions d’Androcur ont reculé de près de 90% entre janvier 2018 et décembre 2023, selon l’ANSM. Fin novembre 2023, moins de 10.000 patientes étaient traitées par Androcur contre environ 90.000 fin 2017. 


A. LG avec AFP

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