mercredi, octobre 23

Le quota d’heures d’enseignement prévu par son statut ? Cela fait dix ans que Mathilde Larrère, maîtresse de conférences en histoire à l’université Paris-Est-Marne-la-Vallée, ne l’a pas vu respecté. Chaque année désormais, les heures complémentaires qu’elle doit abattre l’amènent bien loin des 192 heures de cours qu’elle est supposée réaliser (correspondant aux heures face aux étudiants, sans compter la préparation, les copies, les surveillances d’examen…) : jamais moins de 230 heures, jusqu’à 270 les pires années.

« Bien obligée », dit-elle : faute de titulaires suffisamment nombreux, si elle et ses collègues ne les accomplissaient pas, il n’y aurait tout simplement pas d’enseignants devant les étudiants. « Les postes ont été gelés, les vacataires sont plus difficiles à trouver en fac de banlieue et les congés maternité ou maladie ne sont plus remplacés, alors les formations tournent aux heures complémentaires », raconte la maîtresse de conférences.

Estimées à près de 8 millions d’heures par an en France (soit 25 % de l’enseignement), les heures complémentaires ont pris, ces dernières années, une lourde part dans toutes les universités. Forçant les enseignants-chercheurs à rogner sur leurs heures dévolues à la recherche, supposée représenter la moitié de leur temps de travail.

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« C’est beaucoup moins cher de payer des dizaines d’heures complémentaires que de recruter. Mais cela empiète sur tout le reste, souligne Elina Lemaire, professeure de droit public à l’université de Bourgogne. Prendre en charge un cours ou la responsabilité de gérer une licence, c’est devoir répondre aux étudiants, faire de l’administratif… Plein de tâches éparpillées qui empêchent d’avancer sur des papiers de recherche. »

A l’université d’Artois, le nombre d’étudiants est passé de onze mille à treize mille en trois ans, mais, face à des budgets qui n’ont pas augmenté, voire se sont contractés, ce sont les heures complémentaires qui ont dû compenser cette hausse. « Chez nous, cela correspond à 120 000 heures, avec une moyenne d’une centaine d’heures supplémentaires par maître de conférences. Et ça, c’est la moyenne, car des enseignants qui sont contraints de doubler leur service et de faire 340 heures, nous en avons un certain nombre », détaille son président, Pasquale Mammone. En janvier 2023, il a annoncé les limiter à 50 heures, seulement pour les enseignants bénéficiant d’une prime individuelle pour la recherche. « Et rien que cela rend très difficile d’organiser nos formations », dit-il.

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