dimanche, mai 19
Olivier Blanchard, professeur à l’Ecole d’économie de Paris et ancien économiste en chef du Fonds monétaire international, ici à Stockholm, en Suède, le 28 mai 2018.

A l’heure où les tensions croissantes déstabilisent l’économie mondiale, la France doit augmenter ses dépenses de défense contre la Russie et contre le réchauffement climatique, s’alarme Olivier Blanchard. Professeur à l’Ecole d’économie de Paris et ancien économiste en chef du Fonds monétaire international (FMI), il estime également que les coupes budgétaires de 10 milliards d’euros annoncées par Bercy n’interviennent pas au bon moment et manquent de clarté.

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Vous aviez sonné l’alarme à propos de la dette publique en novembre 2023, quand les taux américains dépassaient les 5 %. Ils sont redescendus depuis. Le pire est-il derrière nous ?

J’étais surtout inquiet à propos de l’énorme déficit primaire américain qui, même si les taux baissent, fera gonfler la dette publique. Il est vrai que les Etats-Unis ont un énorme avantage : leurs bons du Trésor sont considérés comme sans risque et prisés des investisseurs – ils peuvent donc s’endetter plus largement que n’importe quel autre pays.

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Mais il y a une limite. On peut imaginer un scénario où une administration Trump continue de creuser les déficits jusqu’à ce que les investisseurs se demandent s’il n’y a pas un risque. Cela se traduirait par une série de petites crises : des obligations qui peinent à trouver preneurs, une hausse de taux d’intérêt qui effraie le Congrès, des efforts qui se révèlent insuffisants pour rassurer les marchés. Ce qui pourrait finir par déclencher une crise conséquente.

L’Europe, elle, renoue avec la rigueur budgétaire. Commet-elle la même erreur qu’en 2011, quand l’austérité avait étouffé la reprise ?

Réduire le déficit trop vite quand l’activité freine risque en effet d’accentuer le ralentissement. Or, les prévisions de croissance pour l’Europe viennent d’être révisées à la baisse. Il faut donc être prêt à soutenir encore l’économie, même si cela implique un déficit plus important pendant un moment.

Le problème n’est pas le niveau de la dette publique – peu importe qu’elle soit à 100 % ou à 120 % du produit intérieur brut (PIB) –, mais sa stabilisation. Or, la France affiche un déficit primaire (sans compter le paiement des intérêts) d’environ 3 % du PIB. Stabiliser la dette publique impose de ramener à terme ce déficit à 0 %, voire de viser un excédent de 1 %, pour garder des marges de manœuvre en cas de récession. Il faut le faire à la bonne vitesse, ni trop vite ni trop lentement. En pratique, y parvenir exige de définir un plan crédible d’ajustement et de baisse des dépenses sur cinq à huit ans.

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