vendredi, mai 3

Anders Behring Breivik est-il traité de façon inhumaine en prison? La justice norvégienne a de nouveau conclu par la négative ce jeudi 15 février, et a débouté l’extrémiste de droite qui avait tué 77 personnes en 2011.

Détenu, seul, depuis 12 ans dans un quartier de très haute sécurité, Breivik attaquait l’État norvégien, affirmant que son isolement carcéral violait ses droits humains.

Au cours des cinq jours du procès qui s’est tenu début janvier dans le gymnase de la prison de Ringerike (sud-est), l’extrémiste aujourd’hui âgé de 45 ans, parfois en larmes, s’est présenté comme dépressif, dépendant au Prozac, et a accusé les autorités de vouloir le « pousser au suicide ».

Un régime carcéral confortable

De son côté, l’État a justifié le régime carcéral strict mais confortable de Breivik par sa dangerosité, affirmant qu’il présentait toujours « un risque absolument extrême de violence totalement débridée ».

« Breivik bénéficie de bonnes conditions matérielles de détention et d’une relativement grande liberté au quotidien », a tranché la juge du tribunal d’Oslo, Birgitte Kolrud, dans son jugement.

« Il paraît peu réaliste d’envisager des changements majeurs (de son régime carcéral, ndlr) car il est peu probable que l’on assiste à des changements significatifs dans le tableau des risques à court terme », a-t-elle estimé.

Avant l’annonce du jugement, l’avocat de Breivik avait indiqué à l’AFP qu’il ferait appel en cas de revers en première instance.

Le 22 juillet 2011, Breivik avait d’abord fait exploser une bombe près du siège du gouvernement à Oslo, faisant huit morts, puis avait tué 69 autres personnes, des adolescents pour la plupart, en ouvrant le feu dans un camp d’été de la Jeunesse travailliste sur l’île d’Utøya.

Il a été condamné en 2012 à la peine maximale alors en vigueur en Norvège, à savoir 21 ans de prison avec possibilité d’extension tant qu’il reste jugé dangereux.

En prison, il dispose de trois pièces individuelles – une cellule de vie, une d’études et une de gym – à l’étage supérieur et, à l’étage inférieur qu’il partage en alternance avec un autre détenu, d’une cuisine, d’un salon TV, d’une salle à manger et d’une pièce pour les visites.

Il a accès à un écran plat, une console de jeux Xbox ainsi qu’à trois perruches conformément à sa demande d’avoir un animal de compagnie.

« Breivik est particulièrement bien traité », a témoigné le directeur de la prison, Eirik Bergstedt.

Ni déprimé ni suicidaire

Mais son avocat arguait que les autorités n’avaient pas mis en place de mesures suffisantes pour compenser son isolement, ses interactions humaines se résumant essentiellement à des contacts avec des professionnels (gardiens, avocats, pasteur).

« Il ne sortira jamais, il en est bien conscient », a déclaré Øystein Storrvik pendant la procédure. « Peut-on prononcer une condamnation (de facto) à vie et empêcher tout contact humain pendant l’exécution de cette peine? ».

Selon lui, le traitement de son client enfreint l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme qui interdit les « peines ou traitements inhumains ou dégradants ».

Invoquant aussi l’article 8 de la Convention qui garantit un droit à la correspondance, Breivik réclamait également un allègement du filtrage de son courrier.

« Breivik représente le même danger aujourd’hui que le 21 juillet 2011 », a contré Andreas Hjetland, soulignant qu’il pouvait toujours perpétrer des violences ou inspirer d’autres personnes à le faire.

Pendant la procédure, il est ressorti que Breivik avait commis trois tentatives de suicide ainsi qu’une campagne de désobéissance en 2018: il avait alors tracé des inscriptions, notamment une croix gammée, avec ses excréments, s’était écrié « Sieg Heil » et avait observé une grève de la faim.

Deux expertes appelées à la barre ont néanmoins jugé que le détenu n’était ni gravement déprimé ni suicidaire.

« Cela ne donne pas l’impression qu’il avait une réelle envie de mourir », a déclaré la psychologue chargée d’évaluer sa dangerosité, Inni Rein, évoquant des rapports dans lesquels il aurait reconnu que ses tentatives de suicide se voulaient un moyen de voir ses exigences satisfaites.

En 2016, Breivik avait déjà attaqué l’État en justice pour les mêmes motifs et avait partiellement obtenu gain de cause en première instance, avant d’être complètement débouté en appel.

La Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) avait ensuite jugé sa plainte « irrecevable ».

Article original publié sur BFMTV.com

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