dimanche, novembre 24

Histoire d’une notion. Le 8 septembre, le directeur de la firme aérospatiale SpaceX, Elon Musk, annonçait que ses modèles de fusée Starship seraient prêts à assurer leurs premiers vols vers la planète Mars dès 2026. « Rendre la vie multiplanétaire est fondamentalement une question de coût du transport de la tonne de matériaux sur Mars », précisait l’homme d’affaires sur le réseau social X, dont il est propriétaire. En avril, lors d’un discours depuis sa base de production de Boca Chica, au Texas, il avait réaffirmé sa volonté d’y envoyer « mille vaisseaux » d’ici vingt ans. Derrière le projet grandiose de coloniser la Planète rouge, c’est la réussite industrielle de son lanceur spatial qui est en jeu, et à travers lui l’avenir du new space.

Ce terme, introduit à la fin des années 2000, s’est imposé dans les années 2010 pour désigner les formes nouvelles de l’économie spatiale. Aussi appelé « espace 2.0 » ou « espace entrepreneurial », il désigne un secteur astronautique encore en devenir. Là où les anciennes agences spatiales de la guerre froide poursuivaient des visées essentiellement politiques ou militaires, celui-ci serait en passe de donner naissance à un secteur privé économiquement rentable. Organisé autour de nouvelles méthodes industrielles pour la fabrication de satellites et de fusées réutilisables, il ouvrirait la voie du futur pour l’humanité.

Si l’on peut douter que le tourisme spatial, et ses onéreux trajets en vol orbital, se démocratise jamais, en revanche, le projet d’envoyer en orbite basse (à moins de 2 000 kilomètres d’altitude) des dizaines de milliers de satellites et nanosatellites d’observation ou de télécommunication pourrait bientôt toucher une grande partie des habitants de la planète. Il commence d’ailleurs à se matérialiser sous nos yeux : Starlink, le premier fournisseur d’accès à Internet depuis l’espace, déploie déjà d’imposants trains de satellites aisément discernables à l’œil nu.

« Astrocapitalisme »

Certains chercheurs en sciences sociales, travaillant sur ces phénomènes, observés principalement aux Etats-Unis, contestent néanmoins la pertinence de la notion de new space. Plutôt que de reprendre ce terme forgé non sans complaisance par ses acteurs eux-mêmes, ils préfèrent employer celui, plus critique, d’« astrocapitalisme ». Les technologies de la conquête spatiale, en effet, ont toujours articulé l’innovation industrielle à une forme d’organisation institutionnelle associant étroitement intérêts économiques et politiques.

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