POLITIQUE – La gauche cherche le bon mot. Faut-il parler de « déni » du résultat des urnes, de « hold-up démocratique » ou de « trahison du front républicain » ? La nomination de Michel Barnier à Matignon, annoncée ce jeudi 5 septembre par l’Élysée, agace fortement les partenaires du Nouveau Front populaire, convaincus que c’est autour d’eux et de leur candidate Lucie Castets que devait se former le nouveau gouvernement.
Lucie Castets assure n’avoir travaillé que bénévolement pour le Nouveau Front populaire
« L’élection a été volée au peuple français, alerte Jean-Luc Mélenchon, qui a improvisé une déclaration solennelle sur les coups de 13h30. Le Premier ministre est nommé avec la permission et peut-être la suggestion du Rassemblement national. C’est quasiment un gouvernement de Monsieur Macron et de Madame Le Pen. »
« Emmanuel Macron commet une lourde erreur, tranche le député PS Arthur Delaporte. Élu par le front républicain, il cède au chantage du RN et à la droite dure. » La critique de piétinement du front républicain revient beaucoup à gauche : Michel Barnier avait en effet refusé, dans l’entre-deux tours des élections législatives, d’appeler à faire barrage à l’extrême droite, préférant renvoyer le RN et LFI dos-à-dos. « Est-ce pour ces raisons qu’il serait nommé en tant que choix acceptable pour le Rassemblement national ? », interroge l’ancien secrétaire national d’EE-LV David Cormand.
« Protéger les privilégiés »
« La nomination de Barnier est possible parce que Macron considère le RN plus fréquentable que LFI », attaque aussi la députée Sandrine Rousseau. Dans la même veine, son collègue Benjamin Lucas (Génération.s) estime que « nommer quelqu’un qui n’a pas appelé à faire front face à l’extrême droite, c’est insulter le peuple français ». De son côté, l’Insoumis Rodrigo Arenas va encore plus loin, considérant que l’arrivée de Michel Barnier à Matignon est le signe que « Marine Le Pen vient de prendre le pouvoir ».
Autre reproche fait à Michel Barnier : son manque de représentativité et de poids politique. À la primaire LR pour l’élection présidentielle de 2022, il était arrivé quatrième. La candidate désignée, Valérie Pécresse, n’a finalement réuni que 4,7 % des voix, offrant à sa famille politique une déroute historique. À l’Assemblée nationale, LR représente seulement 8 % des sièges. « Le foutage de gueule est total », s’agace le sénateur PCF Ian Brossat, qui parle non pas d’une cohabitation mais d’une « colocation ». « En nommant Michel Barnier, Emmanuel Macron ne cherche qu’à protéger les privilégiés, sa réforme des retraites et son pouvoir », estime la députée ex-LFI Clémentine Autain.
« Dans toutes les démocraties du monde, c’est la coalition arrivée en tête qui est appelée à former un gouvernement. Jamais le parti qui a perdu l’élection », rappelle aussi le Premier secrétaire du PS Olivier Faure, qui fustige un choix « dramatique » et « dangereux ».
Il y a au moins une question qui ne fait aucun doute : le Nouveau Front populaire n’hésitera pas à renverser le gouvernement formé par Michel Bernier. Le député LFI Aurélien Taché confiait au HuffPost la semaine dernière : « Les mecs sont 45, ils sont arrivés 4e aux législatives, comptez sur nous pour les censurer à la seconde où ils arrivent ».
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