mercredi, mai 1

Sujet très sensible notamment sur les réseaux sociaux, le manspreading consiste à s’asseoir les jambes écartées dans l’espace public.
Cette pratique s’oppose au womancrossing qui désigne le fait de croiser les jambes en position assise.
Plutôt que d’y voir une raison physiologique ou médicale, cette posture relève davantage de la sociologie.

Né en 2008 sur Twitter, le manspreading est un néologisme qui a fait son entrée dans l’Oxford Dictionnary en 2015. Traduisible par « l’étalement masculin », ce concept a été développé par des féministes américaines. Elles accusaient certains hommes de s’asseoir les jambes écartées et d’occuper deux sièges au sein de l’espace public et notamment dans les transports en commun. Mais en réalité, ce nouveau mot désigne une incivilité vieille comme le monde. 

Le manspreading, une pratique répandue dans le monde

Cette notion est très ancienne puisqu’on en retrouve une trace en 1836 dans The Time of London. Le journal dédiait un article à la bienséance dans les autobus et conseillait les usagers à faire preuve de civilité : « Asseyez-vous avec vos membres près du corps, et ne décrivez pas un angle de 45° avec vos jambes, ce qui reviendrait à occuper la place de deux personnes« . 

Depuis cette date, rien n’a finalement changé puisqu’en 2013, une campagne de prévention contre le manspreading a eu lieu dans le métro de New York, l’une des premières villes à agir contre l’étalement masculin. Des campagnes similaires ont vu le jour en Corée du Sud, au Japon ou à Istanbul. 

En 2017, la mairie de Madrid a fait ajouter un pictogramme dans le bus afin de demander aux usagers de ne pas occuper deux sièges en s’asseyant les jambes écartées. Dès 2014, le collectif français « Osez le féminisme » interpellait la RATP à ce propos, mais l’appel n’a pas trouvé d’écho. 

Médicalement, est-ce que les hommes ont raison de décroiser les jambes ?

Également nommé « syndrome des couilles de cristal », cet étalement pourrait trouver une explication physiologique. Même si aucune étude scientifique ne confirme cette idée répandue selon laquelle croiser ses jambes comprimerait ses parties intimes. Cependant, le croisement des jambes au niveau des cuisses ou des chevilles provoque des douleurs. Adam Taylor, professeur et directeur du Clinical Anatomy Learning Center à l’Université de Lancaster en Angleterre, explique dans un article publié sur The Conversation que cette posture adoptée de manière prolongée entraîne des maux physiques. Pour les hommes et les femmes. Croiser les jambes engendre la compression d’une zone vasculaire importante située à l’arrière du genou. Ce problème de circulation du sang se manifeste par des jambes lourdes ou des fourmillements. On peut aussi ressentir des douleurs au niveau du dos (scoliose, lumbago…) ainsi qu’un désalignement des hanches. 

Chez les hommes, croiser les jambes peut aussi affecter la production de sperme. Selon Adam Taylor, cette position impacte négativement la qualité des spermatozoïdes. Il vaut mieux une température moyenne entre 2 et 6° en dessous de la température corporelle pour les testicules afin que la production soit optimale. En croisant les jambes, la température augmente de 2 à 3,5°. 

Manspreading, un phénomène sociologique ?

Dans les années 1970, la sociologue française Colette Guillaumin a étudié les postures des hommes et des femmes dans l’espace public. Selon ses conclusions, les femmes croisent les jambes pour respecter les bonnes manières et préserver leur intimité. A contrario, les hommes écartent volontiers les jambes pour contrôler l’espace. 

Interrogée par nos confrères de 20 minutes, Bettina Hannover,  psychologue et professeur à l’Université libre de Berlin, enfonce le clou en y voyant un désir de domination par la posture. Pour elle, il s’agit d’une « question de répartition des sexes« . Ainsi, les hommes ont la volonté de montrer leur domination en décroisant les jambes pendant que les femmes prennent moins de place et se comportent de façon décente. 


Emilie CARTIER pour TF1 INFO

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