jeudi, juin 27

La maladie d’Alzheimer, qui touche environ un million de personnes en France, se caractérise par l’accumulation de plaques de protéines amyloïdes dans le cerveau, et de protéines tau dans les neurones eux-mêmes, ce qui en fait les principales cibles thérapeutiques. Dans la revue Molecular Psychiatry du 14 juin, une équipe française décrit comment, chez la souris, il a été possible d’enrayer en partie ce mécanisme en exploitant une découverte faite en 2012 par une équipe islandaise.

En analysant le génome entier de 1 795 Islandais, Thorlakur Jonsson (deCODE genetics, Reykjavik) et ses collègues avaient mis en évidence une mutation présente chez certains habitants de l’île, qui avait un effet protecteur vis-à-vis de cette maladie neurodégénérative, mais aussi du déclin neurocognitif normal. Cette mutation, dite « A673T », retrouvée chez moins de 1 % des populations scandinaves, se situe sur un gène codant pour une protéine précurseur de l’amyloïde (APP en anglais).

La maladie d’Alzheimer est parfois envisagée selon le modèle des maladies à prions, où une protéine dotée d’une conformation anormale induit de proche en proche cette même structure tridimensionnelle et finit par former des agrégats délétères. A Fontenay-aux-Roses (Hauts-de-Seine), Marc Dhenain (CNRS, CEA) travaille sur cette hypothèse « pseudo-prions », avec l’idée que certaines APP enclenchent ce mécanisme de dominos. « Certaines souches, comme celle d’Osaka, sont très toxiques, explique le chercheur. Nous avons fait l’hypothèse qu’à l’inverse d’autres, comme la souche islandaise, auraient un effet protecteur. »

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L’hypothèse de la cascade amyloïde

Pour le prouver, lui et ses collègues ont injecté un peptide, une petite molécule dérivée de l’APP, porteuse de la fameuse mutation A673T, dans l’hippocampe de souris transgéniques conçues pour mimer la maladie d’Alzheimer. L’hippocampe est une petite structure cérébrale très impliquée dans la mémoire. « L’effet sur l’accumulation d’amyloïde a été mitigé, mais nous avons observé une réduction de l’inflammation, de l’accumulation de protéines tau, de l’atteinte des connexions entre neurones – les synapses – et des troubles cognitifs », énumère Marc Dhenain. La mémoire, notamment, était protégée. Une seule injection engendrait un tel effet pendant quatre mois, selon la publication, « mais nous l’avons désormais constaté pendant neuf mois, ce qui est assez sidérant ».

Comment transférer ces résultats à l’humain ? A l’université Laval (Québec), Jacques Tremblay travaillait déjà sur une thérapie génique faisant appel à des ciseaux moléculaires de type Crispr-Cas9 afin d’introduire la mutation islandaise bénéfique in situ, dans le génome des neurones. « Cette nouvelle publication importante m’encourage à continuer dans cette voie », remarque-t-il, se disant « surpris » par la durée de l’effet bénéfique induit par une unique injection de peptides.

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